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BIOCARBURANT

 

biocarburant


Carburant tiré de la biomasse (plantes telles que les oléagineux, les céréales ou la canne à sucre, matière organique animale telle que les lisiers ou les boues d’épuration), pouvant être utilisé comme additif ou substitué aux carburants pétroliers, parfois appelé « carburant vert ».
1. Les biocarburants de première génération

Les biocarburants produits actuellement, dits biocarburants de première génération, sont de trois types : les huiles (avec notamment le biodiesel), les alcools (avec le bioéthanol) et les biogaz (biométhane). Les huiles et les alcools sont les deux principales filières de production ; toutefois le biogaz est en développement constant.
1.1. La filière huiles

Cette filière part des plantes oléagineuses (tournesol, colza, palmier à huile, ricin...) dont elle extrait, par pression (ou parfois avec un solvant) des huiles végétales. Celles-ci peuvent être utilisées telles quelles (huiles végétales brutes ou HVB) ou en mélange avec du gazole (jusqu’à 50 %) dans les moteurs diesels, ou encore transformées en biodiesel (ou biogazole). Le biodiesel résulte la transformation des acides gras des huiles en esters (transestérification) par l’action d’un un alcool, l’éthanol ou le méthanol. Il peut être utilisé en mélange, jusqu’à 30 %, dans les moteurs diesel classiques. À la pompe, il est, depuis 2010, distribué à hauteur de 7 % du carburant. Des véhicules susceptibles d’utiliser du biodiesel pur ont déjà été proposés en Allemagne.
Le biodiesel est le premier biocarburant employé en Europe (78 % de la consommation totale de biocarburants).
1.2. La filière alcools

À l’exception du méthanol – élaboré à partir du méthane –, la production des alcools se fonde sur les plantes sucrières (betterave sucrière, canne à sucre) et les plantes riches en amidon (maïs, blé, pomme de terre). Le bioéthanol est obtenu par fermentation alcoolique des sucres – simples ou complexes (amidon) –, réalisée par la levure Saccharomyces. Par réaction ultérieure avec de l’isobutène, il permet d’obtenir de l’ETBE (éthyl-tertio-butyl-éther). Le biobutanol est quant à lui obtenu par fermentation acétonobutylique des sucres, réalisée par la bactérie Clostridium.
Les alcools sont destinés aux moteurs à essence, dans lesquels ils peuvent être utilisés purs ou en mélange. En France, c'est principalement l'ETBE qui est utilisé, incorporé dans les essences à hauteur de 15 % au maximum. Le biocarburant E10 renferme quant à lui 10 % de bioéthanol et 90 % de Super sans plomb. Mais le bioéthanol est surtout employé au Brésil et aux États-Unis, où il est mélangé à l'essence, respectivement à hauteur de 25 % et 15 %. D’autre part, les véhicules bicombustibles, qui utilisent la technologie Flex-fuel (mise au point à l’origine pour le marché brésilien), permettent de rouler indifféremment à l’essence ou au bioéthanol, ou aux deux mélangés, quelque soit leur proportion. En 2009 au Brésil, 39 % des moteurs non Diesel étaient des moteurs bicombustibles. En Europe, cette technologie reste marginale, sauf en Suède (deuxième pays utilisateur du Flex-fuel, derrière le Brésil) ; elle a été introduite en France en 2005 et utilise comme carburant le Superéthanol E85 (85  % d'éthanol et 15 % de Super sans plomb 95).
1.3. La filière biogaz

Le biogaz est issu de la fermentation anaérobie – qui se déroule sans oxygène – de la matière organique (plantes cultivées, décharges, boues des stations d’épuration, etc.). Cette fermentation est aussi appelée méthanisation, car le biogaz est essentiellement composé de méthane et de dioxyde de carbone (CO2). Le biogaz est en fait l’équivalent renouvelable du gaz naturel, qui est une énergie fossile. Il est ensuite raffiné pour en tirer du biométhane, qui est du méthane pur. Comme carburant, le biogaz est essentiellement utilisé en Suède.
2. Avantages des biocarburants

Les biocarburants présentent l'avantage d'émettre beaucoup moins de dioxyde de carbone – qui est un puissant gaz à effet de serre – que les carburants traditionnels. Le choix de les promouvoir s'explique principalement par le souci de réduire la dépendance énergétique vis-à-vis du pétrole, de proposer une alternative à l’épuisement des sources d’énergie fossiles, et de limiter l'effet de serre et le réchauffement climatique (en 2004, on estime que la circulation automobile était responsable de 17 % des émissions mondiales de CO2). Les biocarburants offrent aussi à l'agriculture de nouveaux débouchés.
La directive européenne « énergie renouvelable » de 2009 fixe à 10 % la part que les énergies renouvelables dans les transports devrait atteindre en 2020. Elle établit également pour cette date un objectif de réduction de 10 % des émissions de gaz à effet de serre – sur l’ensemble du cycle de vie de tous les carburants – par rapport à 2010.
3. Une alternative controversée

Cependant, un débat s'est instauré sur le réel intérêt écologique des biocarburants. D'une part, les études qui ont été effectuées sur leur rendement énergétique aboutissent à des résultats contradictoires. Il n'est ainsi pas établi que la quantité d'énergie procurée par la combustion des biocarburants soit bien supérieure à la quantité d'énergie consommée pour produire, puis transformer, les plantes qui permettent de les fabriquer. Le niveau de réduction de la pollution atmosphérique par les biocarburants est aussi discuté.
D'autre part, le développement massif des cultures destinées à fabriquer les biocarburants conduit à réduire la place accordée à celles destinées à l'alimentation, avec comme conséquence d'accroître la faim dans le monde. Il est aussi associé à tous les problèmes écologiques inhérents à l’agriculture intensive et aux monocultures : appauvrissement des sols, diminution des réserves d'eau, augmentation de l'utilisation des engrais azotés, etc. Dans un rapport publié en 2007, l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) estime, par ailleurs, que « la transformation des terres pour la production d'énergie à partir de la biomasse poussera les prix alimentaires vers le haut ». L'OCDE souligne également les risques d'érosion de la biodiversité lors du remplacement d'écosystèmes, comme les forêts, les zones humides et les pâturages par des cultures destinées aux agrocarburants.
Sensibles aux critiques formulées à l'encontre des biocarburants actuels, mais soucieux néanmoins de maintenir leur objectif d'atteindre 10 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2020, les États membres de l'Union européenne ont prévu de ne certifier que les biocarburants permettant de réduire de 35 % les émissions de CO2 par rapport aux carburants classiques. Ce seuil sera porté à 50 % vers 2017 et 60 % en 2018, et éliminera notamment la production de carburant à base de colza et de betterave. Par ailleurs, un bonus sera accordé aux agrocarburants issus de terres non utilisées pour les cultures alimentaires. De leur côté, plusieurs pays, dont la France et l’Allemagne, ont choisi, en 2010, de marquer une pause dans le développement des agrocarburants.
4. Perspectives : les biocarburants de deuxième et troisième génération

Des recherches sont en cours (notamment aux États-Unis, en Suède et en Suisse) pour la mise au point de biocarburants de seconde génération, plus respectueux de l'environnement et au bilan socio-économique plus favorable. La principale voie explorée est celle de la transformation de fibres cellulosiques forestières (copeaux de bois, sciure…) ou agricoles (tiges de maïs, paille de blé…) en éthanol. On étudie également la possibilité de tirer des huiles biocarburants de plantes oléifères adaptées aux terres arides et non arables, comme le jatophra (Jatropha curcas).
Parallèlement, la piste des biocarburants de troisième génération est déjà explorée : il s’agit notamment de la culture d’algues microscopiques (microalgues) dans des photobioréacteurs fermés ou des bassins extérieurs, culture de plantes adaptées aux terrains arides et non arables, etc. Ces microalgues peuvent soit être riches en acides gras (ensuite transestérifiés pour obtenir sur biodiesel) – suffisamment pour espérer un rendement très supérieur aux plantes oléifères –, soit contenir des sucres pouvant être transformés en bioéthanol ; elles peuvent aussi être transformées en biogaz. Le premier carburant renfermant du biocarburant à base de microalgues (à hauteur de 7 %) a été testé en 2012.

 

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SONDE SPATIALE

 


SONDE SPATIALE
ASTRONAUTIQUE


Contraintes
Instruments
Missions
Historique
Les débuts de l'exploration du système solaire et de l'Univers
La Lune, le premier objet d'étude
La découverte de Vénus
L'observation de Mercure
Les vols vers l'énigmatique planète Mars
Les premières missions vers Jupiter
La nature de l'atmosphère de Saturne
Les comètes
À la découverte d'une étoile : le Soleil
Les télescopes spatiaux
Comment atteindre les autres planètes
L'aventure des sondes Voyager 1 et Voyager 2
Les dernières missions scientifiques
Magellan : Vénus, un nouveau monde
Galileo : un périple interplanétaire
Ulysses : le découvreur du monde inexploré derrière le Soleil
Clementine

sonde spatiale
La sonde New Horizons
Consulter aussi dans le dictionnaire : sonde
Engin lancé dans l'espace interplanétaire, et destiné à l'étudier.
ASTRONAUTIQUE


Sondes spatialesLa sonde New Horizons
Les premières sondes spatiales ont été lancées en 1959, vers la Lune, par l'ex-U.R.S.S., à qui l'on doit aussi le lancement en 1961, vers Vénus, de la première sonde planétaire. Depuis lors, plusieurs dizaines de sondes ont été lancées, presque exclusivement par les États-Unis et l'ex-U.R.S.S., la plupart pour l'étude de la Lune ou des planètes, les autres pour l'étude du Soleil et du milieu interplanétaire, de comètes ou d'astéroïdes.
Contraintes

Pour parvenir au voisinage des planètes, toute sonde doit parcourir une très grande distance (quelques centaines de millions de kilomètres pour atteindre Mercure, Vénus ou Mars, davantage pour les autres), ce qui exige beaucoup de temps (de 3 à 4 mois pour Vénus, de 5 à 8 mois pour Mars, de 18 à 20 mois au minimum pour Jupiter…). D'où la nécessité de résoudre deux problèmes essentiels. D'abord, celui de la fiabilité du matériel : pour ce type de mission, il est indispensable de disposer de composants électroniques et d'instruments de mesure capables de fonctionner longtemps malgré les particularités de l'environnement spatial (vide poussé, grands écarts thermiques, etc.). Ensuite, le problème des transmissions : tout au long de son voyage, la sonde doit rester en contact avec la Terre (pour recevoir des ordres ou pour communiquer le résultat de ses mesures ou encore pour transmettre les photographies qu'elle a prises). Elle doit donc être dotée d'une puissante antenne d'émission, d'un dispositif de stabilisation pour la maintenir pointée vers la Terre, et y associer une source d'énergie adaptée.
Autre conséquence des grandes distances mises en jeu : la nécessité, pour la sonde, d'assurer elle-même certaines manœuvres de manière autonome, du fait de la longueur des délais de communication avec la Terre.
Ultime contrainte, pour une sonde d'exploration planétaire (ou cométaire) : la nécessité de procéder au lancement à l'intérieur d'une période favorable imposée par la mécanique céleste ; cette fenêtre de lancement se réduit à quelques jours et ne se reproduit qu'à des intervalles de plusieurs mois.
Instruments

Sonde CassiniSonde Cassini
Les instruments scientifiques qu'emporte une sonde planétaire pour remplir sa mission comprennent généralement : une ou plusieurs caméras, pour la transmission de photographies ; des spectromètres et des photomètres pour l'analyse des constituants atmosphériques ; divers détecteurs pour la mise en évidence d'une magnétosphère, de ceintures de rayonnement, d'émissions radioélectriques. À cet appareillage s'ajoutent des instruments destinés à l'étude du milieu interplanétaire : des magnétomètres, pour la mesure des champs magnétiques, et différents capteurs ou détecteurs pour l'étude des particules chargées, des rayonnements, des micrométéorites, du vent solaire, etc.
Missions

Certaines sondes n'effectuent qu'un simple survol de l'astre visé. Plusieurs planètes peuvent être survolées successivement grâce à la technique d'assistance gravitationnelle, qui consiste à utiliser l'attraction gravitationnelle exercée par l'astre survolé pour modifier la trajectoire de la sonde et lui fournir un complément de vitesse sans consommation d'ergols.
D'autres sondes se mettent en orbite autour de l'astre qu'elles doivent étudier : elles peuvent alors répéter les mêmes mesures un grand nombre de fois, ce qui permet d'obtenir une image globale, dans le temps et l'espace, de l'astre et de son environnement. Cette satellisation permet aussi de suivre l'évolution temporelle de certains phénomènes (météorologiques, volcaniques ou autres), d'effectuer des mesures d'altimétrie radar ou de gravimétrie et de mettre en œuvre des techniques d'analyse in situ (capsules de descente dans l'atmosphère, atterrisseurs, pénétrateurs).
Un troisième type de sondes est conçu pour se poser à la surface de l'astre à étudier. Les expérimentations déjà mentionnées peuvent alors être complétées par des mesures portant sur l'atmosphère et le sol. Au stade le plus élaboré, l'exploration in situ peut comporter le prélèvement et le retour sur la Terre d'échantillons de la matière constitutive de l'astre, en vue de leur analyse en laboratoire.
Historique

En permettant d'accroître nos connaissances sur les planètes, les sondes spatiales ont permis de mieux comprendre l'histoire de la Terre, sa formation et son origine. D'ailleurs, de manière symbolique, Voyager 1, avant de quitter le système solaire, s'est retourné une dernière fois pour un ultime cliché : au centre de la photomosaïque, une étoile, le Soleil ; perdues dans l'espace, de minuscules têtes d'épingle, nos planètes.
Les débuts de l'exploration du système solaire et de l'Univers

L'exploration des objets du système solaire a commencé quelques années avant le lancement des premiers satellites.
La Lune, le premier objet d'étude
L'intérêt des ingénieurs soviétiques et américains se porta d'abord vers la Lune. Les premiers lancements soviétiques, en 1958, échouèrent et ne furent jamais annoncés. Plusieurs essais américains furent également vains, bien que deux d'entre eux (Pioneer 1 et 3) aient franchi près de 100 000 km dans l'espace avant de retomber sur la Terre.
La première sonde qui s'arracha à la gravité terrestre fut la sonde soviétique Luna 1, lancée le 2 janvier 1959 ; elle dépassa la Lune et poursuivit sa route dans l'espace. La sonde américaine Pioneer 4, lancée deux mois plus tard, suivit le même trajet. La conquête du système solaire commença véritablement avec l'impact, en septembre 1959, de Luna 2 sur le sol lunaire ; un mois plus tard, Luna 3 photographiait la face cachée de la Lune.
Au milieu des années 1960, trois projets de la NASA avaient pour objectif la Lune. Les sondes Ranger s'écrasèrent sur la surface lunaire mais réussirent, avant l'impact, l'envoi de photographies haute résolution. Les sondes Surveyor se posèrent en douceur et analysèrent la surface, tandis que les sondes Lunar Orbiter, en orbite autour de l'astre, envoyaient des images des sites potentiels d'atterrissage et de régions d'intérêt scientifique général.
Les efforts soviétiques furent similaires et conduisirent à des succès limités peu de temps avant leurs équivalents américains (Luna 9 réussit le premier alunissage en 1966, et Luna 10 fut la première sonde placée sur orbite lunaire, quelques mois plus tard). Les Soviétiques ont mis en service ultérieurement une série de sondes automatiques qui ont rapporté de petits échantillons de sol lunaire, déployé des véhicules automatiques sur roues, les Lunakhod, et réalisé des observations orbitales de la Lune.
Mise en orbite le 11 janvier 1998, la sonde américaine Lunar Prospector emportait à son bord un spectromètre gamma capable de détecter à plusieurs mètres de profondeur des métaux et minerais comme le fer, l'uranium, le silicium, le titane, tandis qu'un spectromètre alpha repérerait les gaz comme l'azote et le radon. L'analyse de ses relevés doit permettre de dresser un atlas géochimique du sol de la Lune, et de confirmer éventuellement qu'il est le siège d'une activité tectonique. Un des premiers résultats des analyses transmises par Lunar Prospector a semblé confirmer la présence de quantités importantes d'eau (sous forme de glace) au fond des cratères polaires.
Toutefois, l'observation de l'impact provoqué du satellite américain Lunar Prospector dans un cratère polaire (31 juillet 1999) n'a pas permis de confirmer ces premières mesures en mettant en évidence une quelconque présence d'eau dans le sol lunaire. L'analyse des données recueillies simultanément par le téléscope spatial Hubble, par le satellite SWAS (Submillimeter Wave Astronomy Satellite), par l'observatoire McDonald au Texas et par le télescope Keck à Hawaii montrèrent que la collision n'avait dégagé aucun élément chimique pouvant révéler que des molécules d'eau avaient été projetées lors de l'impact.
La découverte de Vénus
Le 12 février 1961, avant le vol historique de Gagarine, un engin soviétique appelé Venera 1 quittait la Terre pour voguer vers Vénus, qu'il survola, muet, toute liaison avec la Terre ayant cessé après quinze jours de vol. Mais le premier engin à atteindre avec succès la planète fut la sonde américaine Mariner 2, qui, le 22 juillet 1962, en frôlant Vénus et en l'observant pendant 42 minutes, recueillit et transmit les premières données thermiques et les paramètres orbitaux de cette planète. Mariner 5, en 1967, fournit des mesures détaillées à l'occasion d'un survol.
Vénus sera aussi explorée par des sondes soviétiques. Après trois échecs, Venera 4, sonde de 1 106 kg lancée le 12 juin 1967, atteint Vénus et transmet pendant 97 minutes des données sur l'atmosphère vénusienne. Le 17 août 1970, Venera 7 plonge dans l'atmosphère vénusienne et touche le sol. Dévoilée, l'atmosphère de Vénus se présente comme très dense, composée de dioxyde de carbone, avec des températures élevées (d'environ 475 °C). La sonde survit pendant 23 minutes, sous une pression de 90 bars ! En 1972, Venera 8 survivra 50 minutes à la surface de Vénus, et analysera les roches basaltiques de surface, mesurant leur radioactivité.
En 1975-1976, les missions Venera 9 et 10 sont pour les Soviétiques un succès : les sondes se posent sur le sol de la planète et transmettent des images du sol vénusien.
Deux sondes américaines, lancées en 1978, à cinq jours d'intervalle, atteignent Vénus. Pioneer 1 portait douze expériences sur la chimie et la dynamique atmosphérique, tandis que Pioneer 2 était équipée de quatre minisondes qui traversèrent l'atmosphère vénusienne pour atteindre la surface.
En 1982, les deux sondes soviétiques Venera 13 et 14 photographient en couleurs le sol vénusien, et Venera 14 enregistre des images panoramiques. En 1983, Venera 15 et 16 tourneront autour de Vénus pendant neuf mois, et cartographieront sa surface à l'aide du radar ; la résolution est de l'ordre de 2 km.
Les missions Venera seront suivies par deux missions, Vega 1 et 2, qui déploient des ballons-sondes. Les sondes soviétiques ont procédé à l'établissement de profils verticaux atmosphériques, mais aussi à des mesures de spectrométrie, de chromatographie, de cartographie et d'aéronomie, permettant de connaître la dynamique complexe des tempêtes et des vents violents qui affectent Vénus ; elles ont recueilli aussi une quantité considérable de données sur la surface du sol vénusien ainsi que sur sa composition.
La sonde américaine Magellan, lancée le 4 mai 1989, établit depuis le 10 août 1990 une cartographie radar de la surface de Vénus, révélant des images splendides d'une planète volcanique où ont lieu des phénomènes tectoniques de grande ampleur.
L'observation de Mercure
Lancée le 3 novembre 1973, la sonde Mariner 10 survole Vénus puis, le 5 février 1974, est placée sur une orbite tangente à la trajectoire de Mercure, qu'elle rencontre avec une période de 176 jours. Pendant sa mission, Mariner 10 photographia 45 % de la surface de cette planète, et étudia aussi son champ magnétique ainsi que ses paramètres atmosphériques.
Les vols vers l'énigmatique planète Mars
Les lancements vers Mars se font à intervalles espacés : après un échec soviétique (Zond 1) et américain (Mariner 3), c'est la sonde Mariner 4, qui, en juillet 1965, en passant à 9 844 km de la planète rouge, transmet vers la Terre 17 images, où on reconnaît des cratères ainsi que des bassins.
Malgré de nombreuses tentatives, une seule mission soviétique atteint Mars. Mars 5, en 1973, réussira à retransmettre quelques images de la surface de la planète. Les autres missions seront perdues, manqueront leur cible ou resteront muettes. Si les sondes soviétiques échouent près du but, le vaisseau américain Mariner 9 se place en orbite autour de Mars ; il retransmet, pendant onze mois, un grand nombre de clichés (7 000) remarquablement détaillés, où les planétologues commencent à cartographier des structures d'écoulement fossilisées et de gigantesques volcans, comme le mont Olympus (500 km de diamètre pour une altitude dépassant les 25 km).
Lancée le 22 août 1975, la sonde américaine Viking 1 se pose en douceur, le 20 juillet 1976, dans le désert rouge de Chryse Planitia ; Viking 2 se posera dans Utopia Planitia le 3 septembre 1976. On découvre alors un monde étrangement réel, sous un ciel rouge, des sables ocres et des cailloux polis par le vent. Le sol martien est analysé in situ. Les sondes réalisent trois expériences pour détecter d'éventuelles formes de vie, mais les résultats ne sont pas probants.
En 1989, l'Union soviétique envoie deux sondes pour atteindre le satellite de Mars, Phobos, mais l'on perd le contrôle de l'une d'elles peu après le lancement, et la seconde ne réussit à effectuer qu'une partie du programme prévu.
En octobre 2001, la sonde américaine Mars Odyssey atteint Mars après un voyage de 200 jours. Première sonde parvenue à proximité de la planète rouge après l'échec de Mars Climate Orbiter et Mars Polar Lander (1999), placée en orbite pour deux années, elle a pour mission d'étudier la géologie et la composition chimique de Mars.
Les premières missions vers Jupiter
Les premières missions vers Jupiter ont été le fait des sondes américaines Pioneer 10 et 11, lancées par des fusées Atlas Centaur en 1972-1973. Plus de deux années furent nécessaires à chacune des sondes pour atteindre leur destination avant de continuer vers l'extérieur du système solaire. Leurs mesures de l'environnement de Jupiter, et particulièrement des turbulences rencontrées dans ses ceintures de radiations, ont ouvert la voie aux sondes Voyager lancées en 1977. Voyager 1 et 2 ont découvert de nouvelles particularités du système jovien, comme des satellites inconnus, un anneau étroit ou le volcanisme actif sur le satellite Io. La sonde Galileo, lancée par la navette Atlantis le 18 octobre 1989, fait route vers Jupiter. Bien que cette sonde soit défectueuse, son antenne principale ne s'étant pas déployée, elle fournit de précieuses données et a notamment transmis les premières images de l'astéroïde Gaspra (astéroïde 951), dont elle a croisé la trajectoire en octobre 1991.
La nature de l'atmosphère de Saturne
Saturne a été visitée pour la première fois par la sonde Pioneer 11 en 1979, et l'année suivante les sondes Voyager sont passées à proximité de la planète ; elles ont pris des mesures de son environnement, observé son atmosphère, ses satellites et son impressionnant système d'anneaux. Voyager 2 poursuivit sa route et fut la première sonde à atteindre Uranus, en 1986, puis à survoler Neptune et son principal satellite, Triton, en 1989.
Les comètes
L'International Sun-Earth Explorer fut lancée par la NASA en 1978 sur une orbite lunaire élevée et fut détournée cinq ans plus tard pour une rencontre avec la comète Giacobini-Zinner.
En 1986, les sondes ont rendez-vous avec une comète, celle de Halley. Américains, Soviétiques, Européens et Japonais se mobilisent pour étudier au mieux la comète. Les Américains expédient la sonde ISEE-3, et les Soviétiques lancent deux missions, Vega 1 et 2, qui passent à proximité de Vénus, avant de se diriger vers la comète de Halley, qu'elles photographient. Pendant ce temps, les Japonais ont lancé deux sondes, Planet A et MS-T5.
L'Agence spatiale européenne envoie également une sonde : Giotto. Lancée le 2 juillet 1985 par Ariane 1, cette sonde de 950 kg survole le 14 mars 1986 la comète de Halley, à une distance de 605 km. Bien que de petite taille, elle est équipée d'une chambre photographique, de trois spectromètres, de deux analyseurs de plasma, d'un magnétomètre, d'un détecteur de particules et d'une sonde optique polarimétrique. Giotto a survécu à sa rencontre avec la comète, mais a perdu ses instruments photographiques. Placée en « hibernation », la sonde a pu être réactivée en 1990, pour repartir à la rencontre d'une autre comète, Grigg-Skjellerup, qu'elle a croisée, mais en aveugle, le 10 juillet 1992.
Depuis l'« année des comètes », la cadence des missions s'est ralentie. Les Soviétiques ont mis au point deux missions ambitieuses, Phobos 1 et 2, qui ont échoué très près du but, et les Américains ont vu l'échec de la mission Mars Observer, en 1993.
À la découverte d'une étoile : le Soleil
Les premières sondes Pioneer furent lancées pour observer le Soleil sous des angles divers. Deux sondes allemandes, Helios 1 et Helios 2, furent placées sur l'orbite de Mercure afin de mesurer le champ magnétique du Soleil et d'observer les caractéristiques de son environnement. La dernière mission en date est la sonde américano-européenne Ulysses, destinée à l'exploration des régions polaires du Soleil. Elle a été lancée par la navette spatiale le 6 octobre 1990 et a atteint le pôle Sud du Soleil le 13 septembre 1994, après avoir survolé Jupiter en février 1992. Elle étudie notamment l'héliosphère interne et les vents solaires.
Les télescopes spatiaux

Les conditions d'observation astronomique depuis l'espace, affranchies des contraintes atmosphériques et du brouillage dû aux activités humaines, justifient l'utilisation de télescopes spatiaux. Hubble, lancé le 24 avril 1990 par la navette, devait envoyer des images d'une grande précision d'objets jusque-là inaccessibles. Des erreurs de conception ont limité ses possibilités bien qu'un vol de la navette, en décembre 1993, ait permis aux astronautes d'installer de nouvelles pièces optiques pour pallier ses insuffisances.
Comment atteindre les autres planètes

Les missions planétaires profitent de la mécanique céleste pour réduire les temps de voyage. Ainsi, les missions vénusiennes ont lieu à intervalles réguliers tous les 584 jours, alors que la conjonction favorable pour Mars se produit tous les 780 jours. Pour se déplacer dans le système solaire, les sondes doivent acquérir des vitesses fantastiques. Afin d'économiser le carburant embarqué, elles mettent à profit la gravitation : c'est l'effet « trampoline » conçu par Gary Flandro, qui décrivit en 1965 (alors qu'il était un jeune chercheur de l'université de l'Utah) les possibilités de l'assistance gravitationnelle pour des sondes interplanétaires, reprenant en ce sens les travaux de L. Crocco, qui en 1950 conjecturait sur une mission habitée extraterrestre. Depuis, de nombreuses missions interplanétaires ont utilisé les planètes comme trampoline pour accélérer et défléchir leur trajectoire. Le principe physique en est simple : lorsque le champ d'attraction d'une planète agit sur la trajectoire d'une sonde, cette dernière est déviée, selon sa vitesse et l'angle d'incidence ; la trajectoire est alors « réfléchie », et la sonde accélérée. Cette technique, qui demande de localiser la sonde avec précision, a permis par exemple à Pioneer 10, accélérée par Jupiter, de quitter le système solaire. Galileo a dû tourner deux fois autour du Soleil, puis survoler Vénus et revenir à proximité de la Terre pour enfin partir vers Jupiter.
Animé d'une vitesse supérieure à la troisième vitesse cosmique, un satellite peut aussi s'arracher à l'attraction solaire. Quatre sondes ont ainsi quitté le système solaire et se dirigent vers des étoiles si lointaines qu'elles ne les atteindront qu'après un voyage de plusieurs dizaines de milliers d'années : Pioneer 10 a franchi l'orbite de Neptune et se dirige vers la naine rouge Ross 248, dans la constellation d'Andromède ; Pioneer 11 vogue vers la constellation de la Girafe.
L'aventure des sondes Voyager 1 et Voyager 2
L'idée fut de profiter de l'alignement approximatif, entre 1982 et 1984, des quatre planètes géantes d'un même côté du Soleil pour organiser leur visite par une même sonde spatiale. Lancées à l'assaut des planètes externes, Voyager 1 et 2 reconnaissent successivement : Jupiter en 1979, et Io, satellite hérissé de volcans en activité ; Saturne, ses anneaux et son satellite Titan en 1980 et 1981 ; Uranus en 1986 ; Neptune et son satellite glacé, Triton, en 1989. Les deux sondes, pesant 815 kg chacune, sont alimentées par des générateurs nucléaires. Ces sondes se dirigent vers Sirius, qu'elles survoleront dans 296 000 ans.
Les dernières missions scientifiques
Dans les années 1980, l'Europe rejoignit les deux grandes puissances spatiales, les États-Unis et l'Union soviétique, et se lança à son tour dans l'exploration du système solaire. Mais les annulations de programmes et les échecs sont éclipsés par l'éclatante réussite des Voyager interstellaires, par les résultats de la sonde Magellan, des deux missions internationales (Galileo, Ulysses) et des deux sondes qui ont repris l'étude de la Lune : le satellite japonais Hiten, depuis 1990, et la minisonde américaine Clementine (1994).
Magellan : Vénus, un nouveau monde
Lancée le 5 avril 1989 par la navette Atlantis, la sonde Magellan s'est placée sur orbite autour de Vénus le 10 août 1990, avec une période de rotation de 243 jours, soit une année vénusienne. Depuis, elle retransmet des images radar de la surface de la planète avec une résolution stupéfiante : de 120 à 300 m. Ces images stéréoscopiques, combinées à une altimétrie très précise (30 m), ont permis de reconstituer, à l'aide de traitements et d'algorithmes complexes, des images extraordinaires en trois dimensions.
La beauté des images ne masque pas la complexité des phénomènes géologiques qu'on y reconnaît : volcanisme et tectonique sont étroitement imbriqués et forment un paysage dont les planétologues n'ont pas encore pu percer la dynamique.
Galileo : un périple interplanétaire
Cette mission, lancée à partir de la navette américaine Atlantis le 18 octobre 1989, faillit être un échec. En effet, l'antenne principale à grand gain, chargée de retransmettre le flux d'informations collectées par l'appareillage complexe embarqué, ne s'est qu'imparfaitement ouverte ; la sonde ne transmet les données qu'avec son antenne à faible gain, ce qui diminue le flux de signaux et réduit la quantité d'informations fournies. Mais le survol de l'astéroïde Gaspra, en octobre 1991, montra que la mission n'était pas perdue. Après un dernier survol de la Terre, en 1992, Galileo vogue vers Jupiter. En août 1993, elle survole l'astéroïde Ida, dont elle retransmet d'excellentes images. Enfin, le 7 décembre 1995, elle atteint Jupiter, et largue un module qui s'enfonce à 170 000 km/h dans l'atmosphère de la planète. Tandis que cette sonde atmosphérique retransmettait des mesures sur la composition chimique et les propriétés physiques de l'atmosphère jovienne, Galileo, resté en orbite, survolait les satellites galiléens et enregistrait des centaines d'images : le 30 juin 1996, c'est le survol de Ganymède. Onze survols se déroulèrent jusqu'en novembre 1997.
Ulysses : le découvreur du monde inexploré derrière le Soleil
La sonde spatiale américano-européenne Ulysses a été lancée par la navette Discovery en octobre 1990. La sonde de 370 kg, portant 55 kg d'équipements scientifiques, est conçue pour étudier l'évolution du champ magnétique solaire, les flux de particules et d'ions lourds, la composition et la vitesse des poussières et du rayonnement cosmiques, ainsi que les sources de rayonnements gamma et X. Une expérience mise en place par l'université de Pavie cherche à détecter des ondes gravitationnelles. La sonde a survolé le pôle Sud du Soleil, à 350 millions de kilomètres, du 13 septembre au 5 novembre 1994, avant d'atteindre le pôle Nord en juillet 1995.
Clementine
Une petite sonde de 450 kg réalise une cartographie multispectrale de la surface de la Lune avant de partir à la rencontre d'un astéroïde, Geographos 1620. Le satellite a été placé, en février 1994, en orbite polaire à 420 km d'altitude.

 

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LA GRÈCE

 

Grèce : histoire de la Grèce moderne
La quatrième croisade
L'histoire de la Grèce jusqu'à la fin de la domination romaine (mort de Théodose, 395 après J.-C.) est traitée dans l'article histoire de la Grèce antique.


Résumé

La Grèce byzantine (395-1453)
Christianisée dès le ive siècle, la Grèce occupe dans l'Empire byzantin une place essentielle par son adhésion à la religion orthodoxe. La réaction locale à l'occupation franque après la prise de Constantinople par les Croisés, en 1204 (→ croisades), favorise la formation d'une conscience nationale.
La Grèce dans l'Empire ottoman (xve-xixe siècles)
Près de cinq siècles de domination turque au sein de l'Empire ottoman ne remettent pas en cause l'adhésion des Grecs à la religion orthodoxe.
Le sentiment national se développe ; les Grecs émigrés entretiennent en Occident un soutien à la cause grecque que justifie le prestige de la Grèce antique.
La Grèce indépendante (1832-1944)
Lorsque le pays accède à l’indépendance en 1832, après dix ans de lutte contre le pouvoir ottoman, il n’est encore qu’un petit royaume « protégé » par l’Angleterre, la France et la Russie. Jeux d’influence des grandes puissances, guerre de Crimée, guerre russo-turque, aussi bien que révoltes internes affectent la formation de la Grèce moderne.
Dans ce processus heurté, se distingue, au début du xxe siècle, la figure d’Elefthérios Venizélos, qui obtient, au terme des guerres balkaniques (1912-1913), d’importants avantages territoriaux.
Issue de la guerre gréco-turque (1921-1922), la République grecque (1924-1935) sombre dans l’anarchie et la dictature, avant d’être happée par la Seconde Guerre mondiale, entre occupation italienne et allemande.
De 1944 à nos jours
Après une guerre civile (1944-1949) opposant les résistants communistes aux partisans royalistes, la Grèce – qui se trouve être l'un des enjeux de la guerre froide – est intégrée dans le camp occidental (OTAN, 1952), mais la démocratie reste fragile.
Sa consolidation après la dictature des colonels (1967-1974) est confirmée par l’adhésion à l’Union européenne (1981). Une intégration fortement ébranlée, depuis 2009, par les effets dévastateurs de la crise économique et financière.
1. La Grèce byzantine (ive-xve siècles)

1.1. Une modeste province soumise aux invasions barbares

À la mort de l'empereur Théodose (395), la Grèce se trouve incluse dans l'Empire romain d'Orient. Elle sera ravagée à maintes reprises par les invasions : Wisigoths, Ostrogoths, Huns, Slaves (à partir de 547), Avars (591), Arabes, qui prendront Chypre (649) et Rhodes (654).
Les Slaves colonisent l'intérieur du pays, lentement, pacifiquement et aussi très inégalement selon les régions : la population gréco-romaine trouve refuge dans les grandes villes, dans les régions côtières et les îles. Les Slaves se convertissent au christianisme à partir du ixe s.
L'organisation administrative se transforme. Le péril des invasions entraîne la création de circonscriptions militaires, les thèmes (quatre en Grèce), obéissant à des stratèges. Mais, surtout après la disparition de l'empire romain d'Occident (476), la Grèce prend dans l'Empire byzantin une place éminente dans le domaine culturel.
1.2. Un héritage culturel remarquable

Théodose II, sous l'influence de sa femme Eudoxie, une Grecque, fonde à Constantinople (l'Antique Byzance) une université grecque (425) et autorise à rendre les jugements en langue hellénique. Si Justinien ferme en 529 les écoles philosophiques d'Athènes – regardées comme un foyer de paganisme –, il publie nombre de ses décrets en grec. Vers 630, Héraclius adopte le titre de basileus et fait du grec la langue officielle ; l'Église chrétienne, usant de cette langue, contribue à sa diffusion.
La Grèce est entraînée dans les querelles religieuses qui déchirent l'Empire, et se soulève, en 727, contre Léon III l'Isaurien, l'empereur iconoclaste. Comme le reste de l'Orient d'alors, elle adhère au schisme de 1054 et se rallie au patriarche de Constantinople.
1.3. Nouvelles menaces et invasions (ixe-xie siècles)

Les Arabes, un moment contenus par Constantin V qui a réoccupé Chypre (746), s'emparent de la Crète (826), qui sera reprise en 961, puis de Thessalonique (904) dans le nord de la Grèce. Mais ce sont surtout les Bulgares, dont les incursions se font plus menaçantes. L'ambitieux tsar Samuel s'avance jusqu'aux Thermopyles, où il est finalement vaincu, après trente ans de lutte, par Basile II le Bulgaroctone (Sperkhios, 996).
L'accalmie consécutive à la destruction du royaume bulgare dure presque deux siècles. En 1081, les Normands débarquent en Épire, ravagent l'Eubée et l'Attique (1147).
Ces invasions plongent la Grèce dans la misère. Beaucoup de paysans refluent vers les villes, tandis que dans les campagnes, se forment de grands domaines féodaux.
À partir du xie siècle, les souverains byzantins (→ Alexis Ier Comnène en 1081) recherchent contre les Barbares l'appui de la République de Venise, qui en profite pour obtenir des bases commerciales.
1.4. Dans l'enjeu des croisades (xiie-xve siècles)

Au cours de la troisième croisade, le roi d'Angleterre Richard Cœur de Lion fait la conquête de Chypre (1191), qu'il cède l'année suivante à l'ancien roi de Jérusalem Gui de Lusignan.

La quatrième croisadeLa quatrième croisade
La prise de Constantinople par les croisés (quatrième croisade, 1204) aboutit à la dislocation de l'Empire byzantin, à la création d'un éphémère Empire latin – confié au comte de Flandre Baudouin qui étend son autorité sur la Thrace – et à la formation de principautés franques : le royaume de Thessalonique (repris par les Byzantins dès 1224) ; le Péloponnèse, devenu la principauté d'Achaïe ou de Morée ; le duché d'Athènes.
Pour en savoir plus, voir les articles croisade, Empire latin de Constantinople.
Contre les Francs et les Vénitiens, les empereurs grecs, c'est-à-dire byzantins (Michel VIII Paléologue en premier lieu qui reprend Constantinople en 1261) s'appuient sur les Génois, auxquels ils abandonnent Phocée (1275), les îles de Chio (1304) et de Lesbos (1355). Mais ils sont chassés d'Asie Mineure par les Turcs dès le deuxième quart du xive siècle.
Au xve siècle, la civilisation grecque byzantique brille néanmoins d'un éclat plus vif encore qu'au début de l'Empire d'Orient. Mais cette renaissance est arrêtée par la conquête turque.
2. La Grèce dans l'Empire ottoman (1456-1832)

2.1. Une conquête progressive et inachevée

Le 4 juin 1456, Athènes tombe aux mains des Turcs. Les progrès des conquérants ont été facilités par les querelles entre princes byzantins et par la politique de Venise, qui a longtemps essayé de s'entendre avec eux pour obtenir des avantages commerciaux.
La conquête des terres grecques par les Turcs n'est cependant pas achevée en 1456 : l'empire de Trébizonde survivra jusqu'en 1461 ; Rhodes tombera seulement en 1522, Chypre en 1571, la Crète en 1669, Tínos en 1715 ; quant aux îles Ioniennes, elles échapperont presque totalement aux Ottomans.
D'autre part, la pacification de la Grèce ne sera jamais totale, et de nombreux soulèvements se produiront : en Morée (1463-1479), à Rhodes (1522), en Grèce centrale (1571).
2.2. Une relative autonomie civile, administrative et religieuse

Cependant, les Turcs ne sont pas plus impopulaires aux yeux des Grecs que les Vénitiens et, en général, les Latins. Les sultans se montrent tolérants à l'égard des Grecs, qui gardent leur langue, leur religion et leur organisation religieuse.
La Grèce est soumise à un administrateur de l'Empire ottoman, le beylerbey, sous l'autorité duquel est placée la division administrative ou l'eyalet de Roumélie ; celle-ci est elle-même divisée en sept provinces, ou sandjaks (Morée, Eubée, Béotie-Attique, Thessalie, Étolie-Arcadie, Épire, Grèce centrale), et en districts administrés par un subaşi. Plus tard apparaîtront des groupements de sandjaks – les vilayets – dirigés par des pachas.
Une partie des terres est confisquée pour être distribuée en fiefs militaires aux sipahi (cavaliers) ou attribuée en pleine propriété à des musulmans ou au clergé islamique. Mais les Ottomans laissent leurs biens aux monastères orthodoxes et aux grands propriétaires qui se soumettent ; dans les régions montagneuses, les indigènes conservent aussi leurs terres et leur liberté.
L'occupation turque se présente finalement comme celle d'une armée campée en pays conquis et se préoccupant surtout du maintien de l'ordre ; aussi le patriarche de Constantinople devient-il un chef national pour les Grecs. La perception des impôts étant affermée, des Grecs s'en chargent et acquièrent dans leurs localités une autorité consacrée par leur reconnaissance comme chefs de villages, plus tard assistés de conseillers municipaux élus.
2.3. L'essor du négoce

À la faveur des capitulations signées par le sultan avec la France, l'Angleterre (1580) et les Provinces-Unies (1612), le commerce se développe dans le monde méditerranéen et beaucoup de Grecs s'y adonnent, prenant la place jadis tenue par les Vénitiens. À Constantinople, les Grecs du quartier du Phanar – les Phanariotes – s'enrichissent et forment une bourgeoisie influente jusque sur le gouvernement, qui leur abandonne certaines fonctions, comme celle de drogman (interprète) de la Porte ou Sublime Porte – nom donné autrefois au gouvernement ottoman.
D'autres essaiment comme négociants dans les ports du Levant et de l'Occident, surtout en Russie, où certains entrent au service du tsar (→ Capo d'Istria) ; les principautés roumaines de Moldavie et de Valachie sont placées sous l'autorité de hospodars (princes) phanariotes à partir de 1711.
2.4. L'éveil du sentiment national (xviiie siècle)

Le sentiment national grec s'éveille au xviiie siècle sous le double effet de la décadence turque et de la volonté de la Russie de prendre en main la cause de tous les orthodoxes soumis aux Turcs et de trouver des débouchés maritimes par les Détroits (zone formée, entre mer Noire et Méditerranée, par le Bosphore et les Dardanelles).
En 1768, la tsarine Catherine II entre en guerre contre la Turquie et envoie sa flotte sur les côtes de Morée ; la lutte s'achève par le traité de Kutchuk-Kaïnardji (juillet 1774), qui établit le protectorat russe sur les orthodoxes de Moldavie et Valachie, et permet aux bateaux grecs de naviguer sous pavillon russe. La Russie va désormais avoir les Grecs pour fidèles « clients ».
Les Grecs émigrés entretiennent chez les Occidentaux, impressionnés par le prestige de la Grèce antique, le soutien à leur cause. Parmi eux se détachent Coraï (Koraís), Smyrniote qui se rend en France pendant la Révolution, et Feraíos (Konstandínos Ríghas), qui séjourne à Vienne, où il fonde la société patriotique de l'Hétairie et compose la Marseillaise hellénique – livré aux Turcs, il sera exécuté en 1798.
L'Hétairie est reconstituée en 1814, à Odessa, sous la présidence du Grec Ypsilanti, devenu aide de camp du tsar Alexandre Ier (qui entre en relation avec Ali Pacha de Tebelen, en conflit avec le sultan).
Pour en savoir plus, voir l'article question d'Orient.
2.5. La guerre d'indépendance (1821-1830)

En mars 1821, tandis qu'Ypsilanti tente de soulever les Roumains, l'archevêque de Patras, Ghermanós, et un membre de l'Hétairie, Papafléssas, appellent les Grecs à l'insurrection. Les klephtes (montagnards) de Theódhoros Kolokotrónis, les marins de l'amiral Miaoúlis et de Konstandínos Kanáris leur apportent leur concours.
Après la prise de Trípolis (1821), en Morée, le congrès d'Épidaure, présidé par Mavrocordato, proclame l'indépendance de la Grèce (1er-12 janvier 1822). Mais les Turcs se ressaisissent, pendent le patriarche et se livrent à des massacres (→ Chio, avril 1822).
Soutiens occidentaux
Les Grecs sollicitent en vain l'appui de la Russie au congrès de Vérone, qui suit la politique conservatrice de Metternich. Cependant, l'opinion publique, en Europe et aux États-Unis, s'enthousiasme pour leur cause, et un peu partout se créent des comités de soutien pour leur envoyer des volontaires, des armes ou de l'argent. Les volontaires les plus célèbres ont été le colonel français Fabvier, le poète anglais Byron et lord Cochrane.
Dissensions grecques et sursaut turc
Mais les Grecs, divisés en plusieurs gouvernements locaux, se dispersent en querelles internes. Ils facilitent ainsi la tâche des troupes modernes du pacha d'Égypte Méhémet-Ali, appelées en 1825 par le sultan et qui, sous les ordres d'Ibrahim Pacha, reprennent le pays en deux ans, après la chute de Missolonghi (1826) et de l'Acropole d'Athènes, défendue par Fabvier (1827).
Interventions étrangères
Jean Capo d'IstriaJean Capo d'Istria
La situation est sauvée par le tsar Nicolas Ier, le cabinet britannique de George Canning et le ministère français de Villèle, qui s'entendent, à Londres, pour exiger l'autonomie de la Grèce (juillet 1827). Malgré Metternich, ces États envoient leurs flottes, qui détruisent l'escadre turco-égyptienne en rade de Navarin (→ bataille de Navarin, 20 octobre 1827). Nicolas Ier déclare ensuite la guerre à la Turquie (avril 1828), et la France fait occuper la Morée par les troupes du général Maison.
2.6. L'indépendance sous protection

Le sultan doit signer le traité d'Andrinople (septembre 1829), qui fait des pays grecs situés au sud d'une ligne tirée du golfe d'Arta à celui de Volos, avec les îles d'Eubée et des Cyclades, un État vassal de la Turquie.
Par le traité de Londres (3 février 1830), l'Angleterre, la France et la Russie reconnaissent de fait l'indépendance de la Grèce en offrant la couronne à Léopold de Saxe-Cobourg, qui l'accepte, mais qui est écarté par Jean Capo d'Istria. Celui-ci, élu en 1827 président de la Grèce par l'Assemblée de Trézène, renforce sa dictature à l'encontre des bourgeois libéraux menés par le probritannique Mavrocordato. Mais il est assassiné le 9 octobre 1831.
Après une période d'anarchie, la Convention de Londres (7 mai 1832) fait de la Grèce un royaume indépendant protégé par les trois puissances. La couronne est offerte à Otton de Bavière.
Pour en savoir plus, voir l'article Empire ottoman.
3. La Grèce indépendante entre monarchistes et républicains (1832-1944)

Le pays qui accède à l’indépendance en 1832 reste amputé de nombreux territoires dont la Crète, la Thessalie, la Thrace, l’Épire et la Macédoine. La reconquête de son intégrité territoriale devient ainsi le principal objectif des gouvernements grecs, objectif qui ne sera atteint qu’avec les guerres balkaniques de 1912-1913 et la dislocation de l'Empire ottoman après la Première Guerre mondiale.
3.1. La naissance du royaume de Grèce

La formation de la GrèceLa formation de la Grèce
Otton, le nouveau roi, transfère la capitale à Athènes (1834), mais, en peuplant l'administration et l'armée d'Allemands, il s'attire l'hostilité de ses sujets grecs. Un coup d'État dirigé par Kallérghis (septembre 1843) l'oblige à promettre une Constitution, que vote, en mars 1844, une Assemblée nationale ; une Chambre des députés élue au suffrage censitaire et un Sénat nommé à vie par le roi sont établis, mais il n'y a pas de régime parlementaire. Otton peut ainsi maintenir son autorité avec l'appui de la Russie.
Résurgence de la « Grande Idée »
Otton est très peu populaire, sauf lorsqu'il embrasse la cause de la « Grande Idée », expression forgée en 1844 par le Premier ministre Ioannis Kolettis, qui se fait le champion des Grecs nés hors du royaume. La « Grande Idée » – l'idée de la reconquête de Byzance par les Grecs – parcourt la littérature néohellénique et hante la culture populaire. Au milieu du XIXe siècle, elle passe de la tradition populaire à l'idéologie politique.
Mus par un mouvement nationaliste et irrédentiste, les politiciens grecs, à l'heure où le petit royaume de Grèce est inféodé aux puissances alliées, exaltent l'idéal d'une Grande Grèce « des cinq mers et des trois continents », recouvrant les frontières de l'ancien Empire byzantin à son apogée.
Jeux d'influence
Mécontente, l'Angleterre bloque Le Pirée au début de 1850. Mais cette intervention maladroite renforce l'influence russe, d'autant que le tsar s'est entremis pour faire admettre au sultan l'indépendance administrative de l'Église grecque.
Pendant la guerre de Crimée (1854-1856), les sympathies grecques pour la Russie et les soulèvements des Hellènes dans les provinces turques d'Épire et de Thessalie amènent la France et la Grande-Bretagne à débarquer au Pirée des troupes, qui y demeureront jusqu'en 1857.
D'un roi à l'autre
Le 13 février 1862, la garnison de Nauplie se révolte contre Otton ; le 22 octobre, c'est au tour d'Athènes, où Dhimítrios Voúlgharis, soutenu par les Anglais, proclame la déchéance du roi. Pour établir son influence sur la Grèce, dont la position en Méditerranée orientale est capitale sur la route de l'Inde, l'Angleterre impose comme souverain le beau-frère du prince de Galles, Georges de Danemark, qui prend le nom de Georges Ier (octobre 1863) ; afin de s'attacher la nouvelle dynastie, elle lui donne les îles Ioniennes (1864).
La Constitution de 1864 limite les droits du souverain et établit le suffrage universel. En 1866, Georges Ier favorise un soulèvement des Crétois contre les Turcs, mais non appuyé par les puissances, doit laisser l'île au sultan.
Pendant la guerre russo-turque (1877-1878, → crises et guerres des Balkans), les Grecs pénètrent en Thessalie, province dont la plus grande partie – ainsi qu'une portion de l'Épire – leur sera cédée en 1881.
Le soulèvement des Crétois
Les Crétois s'irritent de la non-exécution des promesses de réformes qui leur ont été faites par le pouvoir turc au congrès de Berlin en 1878. Ils se soulèvent en mars 1896, avec l'appui de volontaires grecs, et, en février 1897, le gouvernement grec fait débarquer ses troupes en Crète.
Par ailleurs, commandés par le prince Constantin (→ futur Constantin Ier), les Grecs entrent en Macédoine, mais sont battus.
La médiation des puissances impose un armistice, et, par le traité de Constantinople (décembre 1897), la Crète est déclarée autonome, dans le cadre de l'Empire turc.
En septembre 1898, de nouvelles révoltes en Crète incitent les puissances à faire nommer dans l'île un haut-commissaire, le prince Georges de Grèce, le second fils du roi. Mais celui-ci, par son autoritarisme, provoque une révolte en 1905 et son remplacement par Aléxandhros Zaímis.
3.2. Les crises balkaniques

La crise balkanique, ouverte en octobre 1908 et qui voit Serbes, Grecs et Bulgares se liguer contre le pouvoir ottoman, entraîne un mouvement nationaliste en Grèce et en Crète, où Elefthérios Venizélos, à la tête de l'insurrection crétoise, proclame le rattachement au gouvernement d'Athènes.
Les efforts unificateurs de Venizélos
En 1910, sollicité par la Ligue militaire – un groupe d'officiers libéraux à l'origine d'une nouvelle rébellion en août 1909 – Venizélos devient Premier ministre après la victoire de ses partisans à des élections démocratiques. Attaché à la réalisation de la Grande Idée, il s'efforce de réunir tous les territoires habités par des Hellènes. D'autre part, il fait voter en 1911 une Constitution assurant les principales libertés et procède à la réorganisation du pays.
En guerre contre les Turcs
Sous le patronage de la Russie, la Grèce s'allie à la Bulgarie, à la Serbie et au Monténégro (mai 1912), et cette Ligue balkanique déclare, le 18 octobre 1912, la guerre à la Turquie. L'armée grecque envahit l'Épire et la Macédoine, s'empare de Salonique (Thessalonique) en novembre puis d'Ioánnina (février 1913).
En mars 1913, Georges Ier est assassiné, et la couronne revient à Constantin, beau-frère de l'empereur allemand Guillaume II.
La Grèce recouvre ses territoires
La conférence de Londres de mai 1913 met fin au premier conflit, mais les discussions sur le partage de la Macédoine entraînent une seconde guerre, opposant principalement la Bulgarie et ses anciens alliés. La défaite de la Bulgarie est suivie du traité de Bucarest (août 1913), qui assure à la Grèce une grande partie de la Macédoine avec Thessalonique, la Chalcidique, Kavála, l'Épire méridionale, la Crète et les îles de Sámos, Chio, Mytilène et Lemnos.
Pour en savoir plus, voir l'article crises et guerres des Balkans.
3.3. La Grèce dans la Première Guerre mondiale

Entre soutien à l'Allemagne et soutien aux Alliés
Lors de la Première Guerre mondiale, le gouvernement grec est divisé entre les germanophiles, groupés derrière le roi, et ceux, qui, avec Venizélos, veulent se ranger aux côtés des Alliés. Quand ces derniers entreprennent l'expédition des Dardanelles, Venizélos propose l'entrée en guerre de la Grèce, mais Constantin Ier l'oblige à démissionner (6 mars 1915).
Venizélos revient en août, à la faveur des élections ; lors de l'invasion de la Serbie (octobre 1915), il veut tenir les engagements de l'alliance de 1913 et conseille secrètement aux Alliés de débarquer à Thessalonique, ne protestant ensuite que pour la forme. Il doit démissionner de nouveau le 5 octobre et est remplacé par Zaímis, puis par Stéfanos Skouloúdhis qui maintient une neutralité favorable aux Empires centraux (Allemagne, Autriche-Hongrie, Bulgarie et Empire ottoman), tandis que les Alliés multiplient les ultimatums.
La constitution, à Thessalonique (septembre 1916), d'un gouvernement républicain par Venizélos, l'amiral Pávlos Koundouriótis et le général Dhanglís amène Constantin à envisager une alliance avec les Empires centraux. Cette politique entraîne le général français à la tête de l'armée d'Orient, Maurice Sarrail, à occuper la Thessalie en mai 1917 ; le 11 juin, celui-ci fait remettre par le haut-commissaire des Alliés, Charles Jonnart, un ultimatum exigeant l'abdication de Constantin. Ce dernier se soumet, et la couronne revient à son second fils, Alexandre, qui rappelle aussitôt Venizélos. Le 26 juin, la Grèce déclare la guerre aux Empires centraux.
Après la guerre
Les revendications de la Grèce sont incomplètement satisfaites, en novembre 1919, lors du traité de Neuilly avec la Bulgarie (acquisition de la Thrace occidentale et de la côte égéenne autour d'Alexandhroúpolis) et, en août 1920, lors de celui de Sèvres avec la Turquie (acquisition de la Thrace orientale, des îles d'Imbros [Imroz] et de Ténedos, de la région de Smyrne).
En septembre 1920, Venizélos dissout la Chambre, mais, battu aux élections du 14 novembre, il s'installe à Paris. En octobre, Alexandre Ier meurt, et le plébiscite du 5 décembre rappelle Constantin Ier.
Pour en savoir plus, voir l'article Première Guerre mondiale.
3.4. La guerre gréco-turque (1921-1922)

En janvier 1921, poussé par les Alliés, le Premier ministre Ghoúnaris lance une offensive générale en Anatolie. Mais l'armée turque de Mustafa Kemal remporte d'éclatants succès sur les Grecs, qui doivent signer l'armistice de Mudanya en octobre 1922.
Des officiers partisans de Venizélos, entraînés par le colonel Plastíras, ont obligé, en septembre, Constantin Ier à abdiquer en faveur de son fils, Georges II ; celui-ci gouverne avec le comité révolutionnaire de Plastíras et de Ghonatás ; Ghoúnaris et les généraux tenus responsables de la défaite sont exécutés en novembre.
Pour en savoir plus, voir l'article crises et guerres des Balkans.
Un échec lourd de conséquences
Par le traité de Lausanne (juillet 1923), la Grèce doit renoncer à Smyrne ainsi qu'à la Thrace à l'est de la rivière Évros (Marica) et accepter d'échanger les minorités avec ses voisins turcs. 1 400 000 réfugiés, dont 200 000 seulement émigrent, aggravent la situation économique.
Ces difficultés provoquent la formation de partis d'opposition : Union démocratique de Papanastassíou, parti communiste appuyé sur un syndicat ouvrier puissant. Cependant, après une tentative de coup d'État royaliste par Metaxás (novembre 1923), les élections de décembre sont un succès pour les partisans de Venizélos, et Georges II se retire en laissant la régence à l'amiral Koundouriótis (18 décembre 1923).
3.5. La République grecque (1924-1935)

Entre anarchie et dictature
La république, proclamée le 25 mars 1924, est confirmée en avril par un plébiscite, l'amiral Koundouriótis devenant président. Mais le pays sombre dans l'anarchie. Le général Pángalos prend le pouvoir en juin 1925 et établit bientôt une dictature, qui sera renversée par le général Kondhýlis en août 1926 ; ce dernier rétablit Koundouriótis à la tête de la République. Après des élections sans majorité, Zaímis forme un gouvernement d'union républicaine et publie en juin 1927 une Constitution parlementaire. La situation intérieure est aggravée par les difficultés financières.
Le retour de Venizélos
Appelé en juillet 1928 à la présidence du Conseil, Venizélos dissout la Chambre, et les élections d'août lui assurent une large majorité, qui lui permet d'exercer un pouvoir personnel. Mais il doit renoncer à son ancienne politique irrédentiste – la réalisation de la Grande Idée – et conclut un traité d'amitié avec l'Italie (septembre 1928), puis avec la Yougoslavie (mars 1929). Il reçoit même le président turc Ismet Inönü (1931) et ne soutient pas le mouvement nationaliste de Chypre.
Ce revirement et l'abandon de l'étalon-or en mai 1932 l'obligent à démissionner (mai 1932) et à céder la place à Papanastassíou, puis, en novembre, à Tsaldháris, chef du parti populaire.
Après une nouvelle tentative de coup d'État (mars 1933) par le général Plastíras, le général Kondhýlis prend le pouvoir (mars 1935) et abolit la république le 10 octobre.
3.6. La restauration de la royauté et la Seconde Guerre mondiale

Rappelé par un plébiscite, Georges II revient en novembre 1935, tandis que Venizélos part pour l'exil. Après avoir formé un cabinet Dhemerdzís, le roi laisse le général Metaxás abolir la Constitution de 1927, dissoudre le Parlement et établir une dictature, qu'il exercera de 1936 à sa mort (1941).
La Grèce, qui a adhéré en février 1934 à l'Entente balkanique, est menacée par les ambitions de Mussolini depuis l'annexion de l'Albanie (avril 1939).
Entre occupation italienne et allemande
Le 28 octobre 1940, l'Italie envahit son territoire.
En avril 1941, les Allemands viennent seconder les Italiens, auxquels les Grecs opposent une résistance acharnée. Après l'occupation de Corinthe par les parachutistes allemands, Athènes tombe le 27 avril, et, le 28, l'ennemi occupe toute la Morée.
Georges II se retire en Crète, défendue par les Britanniques. Le 20 mai, l'île est attaquée par les parachutistes allemands. Après la perte de Khaniá (La Canée) le 27 mai, les Anglais se rembarquent le 1er juin, Georges II allant installer son gouvernement au Caire.
Guérilla et résistance grecques
Les Allemands établissent à Athènes le gouvernement fantoche du général Tsolákoghlou, contre lequel la guérilla est activement menée, à partir de mars 1942, par des organisations de résistance : communistes de l'EAM (Front national de libération) et de l'ELAS (Armée nationale populaire de libération), modérés de l'EKKA (Mouvement de libération sociale et nationale) et de l'EDES (Armée nationale démocratique grecque).
Pour en savoir plus, voir l'article Seconde Guerre mondiale.
4. La Grèce après la Seconde Guerre mondiale

4.1. La guerre civile (1944-1949)

Le 10 mars 1944 est constitué par Svólos un comité provisoire de libération nationale. Georges II appelle dans le gouvernement en exil des représentants de toutes les nuances, notamment Gheórghios Papandhréou, et s'engage à ne rentrer en Grèce qu'après un plébiscite. Par suite de l'offensive russe en Roumanie, les Allemands évacuent la Grèce en octobre 1944 ; les Britanniques débarquent au Pirée (14 octobre).
Mais les résistants de gauche, constituant un front national à direction communiste, refusent de déposer les armes et engagent la lutte contre les Anglais, le 3 décembre. Le roi remet alors ses pouvoirs à un régent, le métropolite d'Athènes, Monseigneur Damaskinos (Dhamaskinós). Celui-ci confie la direction du gouvernement au général Plastíras (janvier 1945). La trêve de Várkiza est alors conclue avec l'EAM-ELAS (12 février). Lors des élections du 31 mars 1946, après une campagne violente des éléments de droite, les partis de gauche s'abstiennent ; victorieux, les populistes (royalistes) organisent le plébiscite du 1er septembre, qui rappelle Georges II.
Les anciens résistants communistes refusent de se rallier à la royauté, et la guerre civile reprend dans les montagnes du Nord, menée par l'armée du général Márkos, qui institue, en décembre 1947, à Kónitsa, en Épire, un Gouvernement provisoire de la Grèce libre, soutenu par les Soviétiques. La lutte est menée contre lui d'abord par les Britanniques, puis, à partir de mars 1947, par les Américains.
Le traité de paix avec l'Italie, signé à Paris (février 1947), donne à la Grèce les îles de Rhodes et du Dodécanèse. Peu après, Georges II meurt (avril) et est remplacé par son frère, Paul Ier.
La guerre civile ne s'achève qu'en octobre 1949, avec la prise, par les forces gouvernementales du général Papághos, des monts Ghrámmos, centre principal des insurgés.
4.2. Une démocratie sous tension (1950-1967)

Les élections de mars 1950 donnent la victoire au parti « centre gauche » du général Nikólaos Plastíras, qui forme le gouvernement (avril 1950). Les partis de droite se réorganisent, sous la direction du maréchal Aléxandhros Papághos, dans le Rassemblement hellénique, tandis que le fils de Venizélos forme une Union des centres. Une nouvelle Constitution, reprenant les principes de la monarchie parlementaire, est adoptée en janvier 1952.
En raison de son importance stratégique, la Grèce reçoit largement l'aide américaine et est admise dans l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) en février 1952.
Papághos forme un gouvernement en novembre 1952. Pour améliorer la situation économique, son ministre Markezínis dévalue la drachme (avril 1953) et signe des conventions commerciales avec la Tchécoslovaquie et l'Allemagne de l'Ouest (1954). Il poursuit une politique de détente avec les États voisins : traités de 1953 avec la Yougoslavie et la Turquie, reprise des relations diplomatiques avec l'URSS.
Après la mort de Papághos (octobre 1955) est mis en place le gouvernement dirigé par Konstandínos Karamanlís, qui, appuyé sur le parti de l'Union nationale radicale (ERE), est à la tête du pays jusqu'en 1963. Le 11 juin, il démissionne après l'assassinat du député de gauche Lambrákis en mai. Les élections du 3 novembre 1963 et celles du 16 février 1964 sont marquées par le succès de l'Union des centres, dont le chef, Gheórghios Papandhréou, dirige dès lors le gouvernement. Au roi Paul Ier, mort le 6 mars 1964, succède son fils, Constantin II.
L’aggravation des tensions entre les communautés turque et grecque de Chypre en 1964 et le rapprochement sur cette question de la Turquie et de l’URSS – qui prend brusquement ses distances avec Monseigneur Makários en 1965 –, incitent le Premier ministre à chercher, prudemment, une solution de conciliation. Cible des attaques de la presse grecque de droite qui l’accuse d'abandonner la cause des Grecs de Chypre partisans de l'Enôsis, et soutenus depuis l’indépendance de l’île en 1959, Gheórghios Papandhréou entre également en conflit avec les militaires et le roi. Ce dernier, sous la pression de l’armée, refuse de signer le décret d’application destituant le ministre de la Défense et du chef d’état-major. Reprochant au roi d'avoir violé la Constitution, le Premier ministre est obligé de démissionner le 15 juillet 1965.
La crise semble trouver une issue provisoire en septembre, avec la constitution d'un cabinet de compromis, dirigé par Kostís Stefanópoulos et appuyé par la droite. Mais la nouvelle équipe gouvernementale se révèle impuissante à sortir le pays de l'instabilité, alors que des manifestations se déroulent en faveur de Gheórghios Papandhréou (mars 1966). Stefanópoulos démissionne en décembre 1966, et le roi appelle Joánnis Paraskevópoulos à former un cabinet avec des personnalités extraparlementaires. Ce cabinet, investi le 13 janvier 1967, démissionne dès le 30 mars. Kanellópoulos prend la tête du gouvernement, dissout la Chambre le 14 avril 1967 et fixe des élections au 28 mai.
5. Le temps des militaires (1967-1974)

5.1. Le coup d'État militaire du 21 avril 1967

Dans la nuit du 20 au 21 avril 1967, deux jours avant l'ouverture de la campagne électorale, un coup d'État militaire est fomenté par un groupe d'officiers : le général Stylianós Pattakós, le colonel Gheórghios Papadhópoulos et le colonel Makarézos. Un nouveau gouvernement, présidé par Kostandínos Kóllias (avec le général Pattakós comme ministre de l'Intérieur et le général Spandidhákis comme vice-Premier ministre et ministre de la Défense), prête serment devant le roi. Se déclarant avant tout anticommuniste et « au-dessus des partis », le nouveau gouvernement prend immédiatement des mesures autoritaires, atteignant surtout l'extrême gauche.
5. 2. Le régime des colonels

À l'extérieur, le « régime des colonels » est confronté à une nouvelle crise grave à propos de Chypre. Devant l'attitude de plus en plus menaçante d'Istanbul, il doit accepter, en novembre 1967, le principe du retrait de ses troupes de l'île, concurremment à celui des forces turques. Le 13 décembre, le roi Constantin tente un « contre-coup d'État », mais il échoue et se réfugie à Rome. Le colonel Papadhópoulos prend la tête du gouvernement, et le général Zoïtákis est nommé régent du royaume.
En septembre 1968, une nouvelle Constitution, adoptée par référendum, attribue l'essentiel des pouvoirs à l'exécutif et reconnaît la prééminence de l'armée dans l'État. À l'été et à l'automne de 1968, une forte opposition se manifeste : un attentat contre le colonel Papadhópoulos est organisé par un militant centriste, Alékas Panaghoúlis ; le 3 novembre, une manifestation hostile se déroule à Athènes, à l'occasion des obsèques de Gheórghios Papandhréou. Mais l'opposition a du mal à s'organiser. La plupart des chefs de parti sont en exil : ainsi l'ancien ministre Konstandínos Karamanlís et le fils de Gheórghios Papandhréou, Andhréas Papandhréou, qui prend, en 1968, la direction du Mouvement de libération panhellénique (PAK). À la suite d'un accord entre le PAK, le Front patriotique (d'extrême gauche) et le mouvement « Défense démocratique » (centre gauche), des structures communes de résistance sont créées à Stockholm le 2 avril 1969. En fait, l'opposition est divisée.
5.3. Tentative de démocratisation

À partir de 1970, la réalité du pouvoir appartient au seul colonel Papadhópoulos. Se refusant toujours à organiser des élections, ce dernier crée, au début de 1970, un organe consultatif dont les membres sont soit nommés par le gouvernement, soit élus par les organisations socioprofessionnelles. Une certaine libéralisation est tentée. Mais, le 25 mars 1971 (jour anniversaire de l'insurrection de 1821 contre les Turcs), 133 personnalités de la gauche et de la droite monarchiste réclament le rétablissement de la souveraineté populaire. Le gouvernement réplique par des procès politiques. Papadhópoulos élimine le régent Zoïtákis et prend en main l'appareil de l'État (mars 1972). Craignant un revirement de l'opposition en faveur du roi, le colonel Papadhópoulos, le 1er juin 1973, proclame la république, qui est ratifiée au référendum du 29 juillet ; le colonel accède alors à la magistrature suprême.
5.4. La chute du général Papadhópoulos

Le 14 novembre 1973, des étudiants d'Athènes et d'autres universités se retranchent dans l'École polytechnique d'Athènes et lancent des appels à la révolte. Soutenus par une partie de la population, ils sont expulsés par les forces armées le 17, après une sanglante répression. La loi martiale est proclamée le même jour, et les tribunaux militaires sont mis en place. Le 25 novembre, Papadhópoulos est renversé par une junte dirigée par le général Ghizíkis, qui se proclame président de la République et forme un nouveau gouvernement. La Constitution est suspendue, et la loi martiale prorogée. La répression contre l'opposition s'amplifie, cependant que la Grèce subit une des inflations les plus fortes d'Europe.

 

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LA MÉSOPOTAMIE - HISTOIRE

 

Mésopotamie : histoire
(littéralement « le pays entre les deux fleuves »)
La Mésopotamie ancienne
Cet article fait partie du dossier consacré à la Mésopotamie.


Bassin alluvial d'Asie, en contrebas du Taurus et du Zagros, à l'est du désert syrien, où coulent les cours inférieurs du Tigre et de l'Euphrate (réunis en aval dans le Chatt al-Arab) et celui du Karun.
Vaste région de 375 000 km2, qui comprend toutes les terres basses des bassins de l'Euphrate et du Tigre, et correspond en gros aux pays actuels de l'Iraq et du nord-est de la république de Syrie, la Mésopotamie est le plus ancien et, du VIe au Ier millénaire avant J.-C., le plus important des foyers de la civilisation.
Employé pour la première fois, semble-t-il, par l'historien grec Polybe au iie siècle avant J.-C., le terme de Mésopotamie, loin de désigner la totalité du bassin, ne dénommait alors que le territoire compris entre l'Euphrate et le Tigre au nord de la Babylonie centrale ; ce n'est que très progressivement, et essentiellement à une époque très récente, qu'il a été employé pour désigner la totalité de la région.
HISTOIRE

1. Avant l'histoire (jusque vers 3500 avant J.-C.)

1.1. Du paléolithique au mésolithique (xiie-ixe millénaire avant J.-C.)

La Mésopotamie ancienneLa Mésopotamie ancienne
Cet ensemble de plaines et de collines, limité à l'est et au nord par les montagnes de l'Iran occidental et de l'Anatolie orientale, au sud-ouest par le désert syro-arabe, au sud-est par le golfe Persique, connaît jusqu'à la fin de la dernière période glaciaire (il y a 12 000 ans) des climats et une végétation naturelle très différents de ceux de l'époque historique. Les hommes du paléolithique y ont sans doute vécu, mais, dans ce pays où les fleuves arrachent, puis déposent d'énormes masses de sédiments, il n'y a guère de chances que l'on retrouve un de leurs habitats minuscules.
Vers le IXe millénaire avant notre ère, le climat commence à se rapprocher des conditions actuelles, et les groupes du mésolithique (stade intermédiaire entre le paléolithique des chasseurs et le néolithique des agriculteurs) abordent la Mésopotamie à partir des hautes vallées du pourtour montagneux, qui sont fréquentées par les humains depuis 60 000 ans au moins et qui possèdent à l'état sauvage des animaux précieux (ovins, caprins, bovins, porcins) et des céréales (blé, orge).
1.2. Naissance de l’agriculture (viiie millénaire avant J.-C.)

En haute Mésopotamie
Au VIIIe millénaire avant notre ère, le genre de vie agricole apparaît dans les vallées proches du pays des Deux Fleuves et sur le piémont, avant de s'étendre en haute Mésopotamie ; cette région, qui comprend le nord du pays des Deux Fleuves jusqu'au point où l'Euphrate et le Tigre se rapprochent pour la première fois en plaine, peut porter des cultures sèches dans la bande proche de la montagne ; au-delà, les pluies sont insuffisantes pour ce type de culture et les fleuves trop encaissés pour permettre l'irrigation en grand, et l'on doit s'y contenter de la vie pastorale. Au pied des montagnes, au contraire, des communautés ont bientôt l'idée d'utiliser les eaux de ruissellement, puis de creuser des canaux.
En basse Mésopotamie
Cette technique nouvelle trouve son plein emploi quand l'homme colonise la Susiane – pays plat aux nombreuses rivières, qui fait partie de l'Élam (sud-ouest de l'Iran) – et la basse Mésopotamie. Celle-ci est d'abord une plaine basse, puis, plus au sud-est, un delta intérieur, où les sédiments s'enfoncent lentement ; là, avant d'atteindre la mer, les fleuves abandonnent la majeure partie de leurs alluvions et de leurs eaux – ces dernières s'évaporant ou s'accumulant dans des lacs ou des marais. Les vents de sable ou de poussière, l'aridité et les inondations brutales font un enfer de ce pays, qui attira peut-être ses premiers habitants par la richesse de ses eaux en poissons et de sa forêt-galerie en fruits. On ne risque guère, là non plus, de retrouver les tout premiers habitats, et les archéologues n'y ont rencontré que de gros établissements agricoles.
1.3. Les premières sociétés (VIIe millénaire avant J.-C.)

Les contraintes de l’irrigation
En effet, l'irrigation pose ici des problèmes plus complexes qu'en Égypte : la crue des fleuves intervient au printemps ; il faut retenir alors les eaux et les redistribuer ensuite sur le reste de l'année pour que les cultures ne soient pas noyées au printemps, quand elles sortent de terre, ni brûlées par l'aridité de l'été et de l'automne.
Seule une communauté de fort effectif peut construire un système d'irrigation avec digues, bassins de retenue, canaux d'amenée et d'évacuation des eaux. Moyennant un énorme travail, l'argile fertile des alluvions donne des récoltes de dattes, d'orge, de blé et de sésame abondantes et relativement régulières, qui, à leur tour, contribuent à l'entretien d'un cheptel important. Malgré son étendue limitée (40 000 km2, dont plus de la moitié sont couverts par les eaux), le Bas Pays nourrit une population plus nombreuse qu'en haute Mésopotamie.
Une nécessaire organisation
L'absence de matières premières, en dehors de l'argile et du roseau, en basse Mésopotamie, contraint les agglomérations à développer leurs échanges de denrées alimentaires, de laine et de produits de l'artisanat contre le bois, les pierres dures ou rares et le cuivre, qui viennent des montagnes de la périphérie ou même des régions plus lointaines. Très tôt, l'artisanat et le commerce occupent une part importante de la population, la spécialisation professionnelle et la hiérarchie sociale se précisent, et le Bas Pays devient le foyer culturel de l'ensemble mésopotamien.
1.4. Les premières civilisations (VIIe-IVe millénaire avant notre ère)

Le terme de « civilisations » est employé ici, faute de mieux, s'applique à une région étendue dont les agglomérations ont en commun une céramique caractéristique pendant une longue période. De plus, toutes ces civilisations débordent sur les pays voisins (Iran, Anatolie, couloir syrien, Arabie), et l'on ignore encore quel est leur point de départ.
Si on laisse de côté les groupes pionniers, d'étendue limitée, comme ceux de l'Euphrate moyen (fin du VIIe millénaire avant notre ère), dont la céramique foncée polie (dark burnished) vient d'Anatolie, et ceux du piémont (comme celle du site de Jarmo), la série des civilisations commence avec les poteries peintes.
Hassouna et Samarra (vers 7000-5500 avant J.-C.)
La civilisation de Hassouna (au sud de Ninive, à l'ouest du Tigre) est limitée aux pays d'agriculture sèche du bassin du Tigre en haute Mésopotamie (VIe millénaire avant notre ère). Celle de Samarra (sur le Tigre moyen, au nord-ouest de Bagdad), qui se situe dans la seconde moitié du VIe millénaire avant notre ère, est le propre d'agriculteurs qui colonisent toute la haute Mésopotamie utile et affrontent à l'est, dans la vallée du Tigre moyen et sur le piémont, les sols humides, où ils creusent les premiers canaux ; des outils de cuivre martelé, des perles de turquoise et de cornaline témoignent d'un commerce avec l'intérieur de l'Iran ; et, au tell es-Sawwan (ou al-Suwan ; 10 km au sud de Samarra), un établissement protégé par un fossé possède déjà un temple.
Avant la fin du VIe millénaire avant notre ère, les premiers établissements connus de la basse Mésopotamie fabriquent des céramiques (celles d'Éridou, de Hadjdji Muhammad, d'Obeïd, dans la basse vallée de l'Euphrate) qui auraient une parenté avec celle de Samarra.
Tell Halaf et El-Obeïd (vers 5500-3500 avant J.-C.)
Après 5500 avant J.-C., la partie de la haute Mésopotamie consacrée à la culture sèche connaît la diffusion de la céramique de tell Halaf (un tell – « colline » de la partie nord-ouest du bassin du Khabur), qui dure en certains sites jusque vers le milieu du IVe millénaire avant notre ère, mais qui, la plupart du temps, est remplacée par celle d'Obeïd (6 km à l'ouest d'Our), venue du sud (vers 4300 avant J.-C.) et destinée à durer en quelques agglomérations du nord jusque vers 3500 avant J.-C.
Ourouk et Djemdet-Nasr (à partir de 3750 avant J.-C.)
La poterie d'Obeïd est finalement remplacée par celle d'Ourouk (sur l'Euphrate inférieur), qui est diffusée à partir du sud de la basse Mésopotamie (vers 3750-3150 avant J.-C.) et qui, produite en masse, n'a pas de décor peint. La poterie peinte de Djemdet-Nasr (15 km au nord-est de Babylone) apparaît dès 3150 avant J.-C. et dure jusqu'au début du IIIe millénaire.
Les principales avancées
Durant cette longue période, l'organisation économique et les techniques progressent dans l'ensemble de la Mésopotamie : après le milieu du Ve millénaire avant notre ère, le sceau se répand, mais nous ne savons pas quel type de propriété il sert alors à marquer. Le commerce s'amplifie avec l'Iran, riche en minerais, et, à la fin du Ve millénaire avant notre ère, avec le cuivre martelé pour l'outillage au pays des Deux Fleuves. La concentration de la population en grosses agglomérations et l'enrichissement, qui vont de pair, se traduisent par l'édification de temples en briques crues, rebâtis et agrandis de siècle en siècle. On connaît deux séries de temples : celle d'Éridou (depuis 5300 avant J.-C. environ), au Bas Pays, et celle de tepe Gaura (depuis 4300 avant J.-C. environ), au nord-est de Ninive ; et la construction du temple sur une plate-forme à laquelle on accède par une rampe (à Éridou, vers 4300 avant J.-C.) est peut-être la première étape vers la réalisation de la ziggourat.
2. L'entrée dans l'histoire (vers 3450-3000 avant J.-C.)

Le changement essentiel se fait lors de la période (vers 3450-3300 avant J.-C.) que l'on nomme « Ourouk 4-3 » (deux niveaux du grand sondage de l'Eanna, temple de la déesse d'Inanna à Ourouk), « Protoliterate » (débuts de l'écriture) ou « Prédynastique final » (l'époque suivante étant le « Dynastique archaïque »), dénominations qui n'ont pas fait disparaître la division en périodes d'Ourouk (vers 3750-3150 avant J.-C.) et de Djemdet-Nasr (vers 3150-2900 avant J.-C.).
2.1. Un bond décisif

C'est dans la partie méridionale de la basse Mésopotamie (le pays historique de Sumer), le delta intérieur, où les crues sont moins dangereuses et les travaux d'irrigation moins difficiles, que se trouve le foyer de la civilisation nouvelle qui différencie ce pays du reste de l'Orient. Celle-ci naît de l'interaction de l'augmentation de la population, de sa concentration en agglomérations plus importantes (peut-être déjà de véritables villes), des découvertes qui se situent à la fin d'Obeïd et au début d'Ourouk (cuivre moulé, tournette, puis tour à potier, chariot), de l'accroissement des échanges avec le reste de l'Orient (l'or et le lapis se répandent au pays des Deux Fleuves).
2.2. Les premières cités-États

Cette nouvelle civilisation se traduit par un essor rapide des arts. Chaque centre élève des temples, qui sont rapidement remplacés et que l'on décore de peintures murales et de mosaïques faites des têtes peintes de cônes de terre cuite enfoncés dans la muraille ; ces édifices atteignent parfois de vastes dimensions (le temple C d'Ourouk mesure 54 m sur 22 m). Cette époque voit aussi les débuts de la sculpture (reliefs de vases, stèles, figurines), qui donnent parfois des chefs-d'œuvre, comme la Dame d'Ourouk. Les artisans de la glyptique (art de tailler les pierres précieuses), également habiles, gravent sur les cylindres-sceaux une extraordinaire variété de sujets.

Tablette d'écriture picto-idéographiqueTablette d'écriture picto-idéographique
Toute cette activité est destinée à la divinité ou aux plus importants de ses serviteurs. La population est déjà organisée en cités-États, possédant leur conseil des Anciens et leur assemblée, et, si l'on en juge par certaines œuvres d'art, un roi guerrier est plus influent que les prêtres et que ceux qui gèrent le domaine du dieu.
2.3. L'invention de l’écriture (vers 3300 avant J.-C.)

Écriture pictographique sumérienneÉcriture pictographique sumérienne
Cette grande unité économique, qui comporte champs, troupeaux, ateliers, greniers et magasins, n'englobe ni toute la terre de la cité ni toute sa main-d'œuvre, mais elle est la seule à avoir laissé des traces : c'est pour ses comptes et ses contrôles que l'on invente la première de toutes les écritures et le sceau de forme cylindrique qui, mieux que le cachet plat, couvre le tampon d'argile des portes et des récipients d'une empreinte continue qui en garantit l'intégrité. Attesté à Ourouk dès 3400 avant J.-C. environ, ce système graphique, qui est l'ancêtre de l'écriture cunéiforme, emploie dès avant 3000 avant J.-C. les signes phonétiques qui permettent d'y lire du sumérien.
2.4. Le problème sumérien

Pour cette raison, bien que Sémites et Sumériens soient déjà mêlés dans toute la basse Mésopotamie, on est porté à attribuer aux Sumériens l'invention de l'écriture. Mais les spécialistes ne sont pas d'accord sur la date d'arrivée de ce peuple au Bas Pays : les uns pensent que c'est lui qui a colonisé la région dès le VIe millénaire avant notre ère, puisque, à partir de cette période, il n'y a là aucune rupture culturelle liée à des destructions qui indiqueraient une invasion ; d'autres, remarquant qu'il y a dans le vocabulaire sumérien des termes techniques qui sont étrangers aux langues sumérienne et sémitique, estiment que les Sumériens sont venus tardivement submerger sous leurs infiltrations un peuple plus évolué et plus anciennement installé au Bas Pays.
2.5. L'extension de la civilisation mésopotamienne

Sumérienne ou non, la civilisation qui apparaît vers le milieu du IVe millénaire avant notre ère dans le sud de la basse Mésopotamie manifeste après 3300 avant J.-C. davantage de dynamisme. Dans son pays d'origine, s'il n'y a plus d'inventions, les techniques découvertes précédemment sont mises plus largement au service de la production ; les objets d'art sont moins soignés, mais plus nombreux. La civilisation de la haute Mésopotamie, elle, qui prolongeait celle d'Obeïd, recule après la destruction (vers 3400 avant J.-C.) de tepe Gaura, la ville aux trois temples, qui était la principale bénéficiaire du commerce entre l'Iran et le pays des Deux Fleuves.
Au contraire, le foyer culturel du Sud englobe rapidement le nord de la basse Mésopotamie, la plaine fluviale, plus tardivement colonisée parce que plus difficile à irriguer. Et des traces de l'influence du Sud, plus ou moins importantes suivant la distance, se retrouvent en Susiane, en haute Mésopotamie, en Iran, en Syrie septentrionale et jusqu'en Anatolie et en haute Égypte.
2.6. Le problème de la chronologie

L'entrée dans l'histoire s'accompagne de celle dans le temps mesuré. Or, la reconstitution de la chronologie de l’Asie occidentale ancienne par les modernes comporte de terribles difficultés, dues avant tout au fait que la notion d'ère est inconnue dans cette région culturelle avant l'installation de la dynastie gréco-macédonienne des Séleucides à Babylone, dont la date initiale (312 / 311 avant J.-C.) est le point de départ d'une ère – innovation probablement due à des Grecs.
Trois systèmes de datation
Auparavant, les scribes des États les plus évolués (d'abord ceux de la Mésopotamie) ont employé trois systèmes élémentaires :
1. Depuis le xxve siècle avant J.-C. au moins, dans certaines cités-États, chaque année reçoit officiellement le nom d'un événement important (en fait qui se situe l'année précédente), par exemple : « année (où) le pays de Simourrou fut détruit », ou bien un numéro la situant par rapport à une année du type précédent, ainsi : « année II suivant (celle où) il construisit la grande muraille de Nippour et d'Our » ; et chaque début de règne donne une « année (où) X devient roi ».
2. Depuis le xxvie siècle avant J.-C. au moins, certaines cités-États, comme Shourouppak, en Sumer, ou Assour, donnent à chaque année le nom d'un magistrat éponyme.
3. À partir du xive siècle avant J.-C. au moins, en Babylonie, on attribue à chaque année le nombre ordinal qui la situe dans un règne : « année 8e » (de tel roi), par exemple.
Des listes royales insatisfaisantes
Très tôt, on a dressé des listes d'années, dont on a tiré des listes royales, qui ne comportent que la suite des souverains avec le nombre d'années de chaque règne. Mais rien n'est plus décevant que ce genre de textes. Ou bien les listes sont incomplètes, par suite d'une cassure de la tablette, ou bien, à cause d'erreurs des scribes, elles sont contradictoires dans le cadre d'un même État. À cela s'ajoute le fait que les dynasties parallèles abondent dans ce monde toujours politiquement morcelé et que la confrontation des listes correspondantes nous vaut de nouvelles divergences. Les découvertes de textes chronologiques, encore fréquentes en Mésopotamie et dans les pays voisins employant les cunéiformes, permettent cependant de rétrécir la marge d'incertitude.
Un Ier millénaire avant J.-C. mieux connu
Mais seule la conservation d'une liste de 263 magistrats éponymes assyriens consécutifs fournit une base solide (pour la chronologie du Ier millénaire avant J.-C.), car l'indication d'une éclipse de soleil sous l'un d'eux permet de situer son année en 763 avant J.-C. et l'ensemble de la liste de 911 à 648 avant J.-C.
Les scribes égyptiens nous ont laissé également des listes royales avec des noms d'année et des durées de règne, remontant jusqu'à la Ire dynastie (fin du IVe millénaire avant notre ère). Quelques textes donnant pour l'année x de tel règne la valeur du décalage de l'année usuelle de 365 jours par rapport à celle, plus exacte, qui comprend 365 jours 1/4, permettent de situer à trois ans près, des dynasties, dont la plus ancienne est la XIIe (xxe-xixe s. avant J.-C.). Mais les lacunes et les contradictions se rencontrent également dans les listes égyptiennes, et les divergences chronologiques sont donc accrues pour les périodes où Égyptiens et Asiatiques sont en contact et citent des événements qui leur sont communs.
Références chronologiques
Donc, si chaque spécialiste construit sa chronologie personnelle, les ouvrages de grande diffusion ont intérêt à employer la chronologie donnée pour chaque grande aire culturelle par les œuvres savantes les plus répandues (par exemple la nouvelle édition de la Cambridge Ancient History, ou le Proche-Orient asiatique de Paul Garelli). On pourra particulièrement consulter les articles « Datenlisten » (1934) et « Eponymen » (1938) par A. Ungnad dans le Reallexikon der Assyriologie (Berlin-Leipzig, volume II, p. 131-194 et 412-457) et le fascicule « Chronology » (1964) par William C. Hayes et M. B. Rowton de la Cambridge Ancient History.
3. Le « Dynastique archaïque » (vers 2750-2350 avant J.-C.)

3.1. Des cités prospères

Dans cette période dite « Dynastique archaïque », la basse Mésopotamie continue à progresser rapidement, surtout au « Dynastique archaïque III » (vers 2600-2350 avant J.-C.), en dépit de son morcellement politique en cités rivales.

Lagash, tête de taureauLagash, tête de taureau
Dès le début, il y a eu une diminution du nombre des agglomérations et une augmentation de la taille de celles qui survivent. Il n'y a plus maintenant de doute : ce sont de véritables villes, ceintes d'une muraille. Leurs relations, qui s'étendent alors au sud-est de l'Iran (tepe Yahya) et à la vallée de l'Indus, leur valent toujours plus de matières premières et de recettes techniques. La métallurgie du cuivre accroît sa production et améliore ses procédés : dès 2500 avant J.-C., on réalise pour des objets d'art un véritable bronze d'étain. Les offrandes des temples et de certaines tombes montrent la richesse du pays et l'habileté de ses artisans : si la sculpture est en déclin, sauf pour la représentation des animaux, la métallurgie et l'orfèvrerie témoignent d'un goût raffiné.
3.2. Les divinités civiques

Our-Nanshe, roi de LagashOur-Nanshe, roi de Lagash
Les villes continuent à élever des temples, où les notables déposent des offrandes et des orants (figurines qui les représentent en prière). Chaque cité a plusieurs temples (chacun d'eux pouvant héberger les idoles d'une divinité seule, d'un couple divin ou d'une famille de dieux) ainsi qu'un panthéon hiérarchisé et dominé par la divinité protectrice de la ville. Les représentations conventionnelles des dieux, les symboles qui les désignent et les premières inscriptions permettent d'identifier des divinités qui étaient sans doute en place aux âges précédents et se maintiennent jusqu'à la fin de la civilisation mésopotamienne : ainsi, chez les Sumériens, Inanna (déesse de la Fécondité), Enlil (le Vent), Enki (l'Eau bienfaisante), An (le Ciel).
3.3. Des rois-prêtres à la séparation temple-palais

Itur-ShamaganItur-Shamagan
Les inscriptions historiques qui apparaissent au xxviie siècle avant J.-C. et les archives de Tello (un site du royaume de Lagash, sur le Tigre inférieur), du xxvie au xxive siècle avant J.-C., révèlent les institutions que l'on entrevoyait seulement pour le IVe millénaire avant notre ère. Chaque cité-État est gouvernée par un roi héréditaire (en « seigneur » ou lougal, « grand homme »), qui est vicaire (ou bien ensi « délégué », « gouverneur ») du grand dieu local et le chef des guerriers. À la même époque, semble-t-il, ce souverain cesse d'habiter le temple, et l'on construit les premiers palais, tandis que l'on se met à distinguer l'unité économique dépendant du dieu de celle qui appartient au roi (les historiens les nomment temple et palais). Parfois, le pouvoir sacerdotal (représenté par un « comptable », ou prêtre), séparé du pouvoir royal, se heurte à ce dernier.
3.4. Les guerres entre cités

Brique de fondation du temple de Girsou.Brique de fondation du temple de Girsou.
En dehors de l'édification des temples et du creusement des canaux, le roi de la cité s'occupe de faire la guerre à ses voisins et essaie d'imposer à quelques-uns d'entre eux sa prédominance. Ces dominations éphémères et géographiquement limitées sont exercées à partir de villes de basse Mésopotamie (→ Kish, Our, Ourouk, Lagash, Oumma, etc.) par des rois à noms sumérien ou sémitique (comme Mesanepada, fondateur de la Ire dynastie d’Our, ou Eannatoum de Lagash, dont la victoire sur Oumma est commémorée par la magnifique stèle des Vautours du musée du Louvre, ou encore ce Gilgamesh d'Ourouk, source de la plus fameuse épopée mésopotamienne, couchée par écrit dans la première moitié du IIe millénaire avant J.-C.), de l'Euphrate moyen (la sémitique Mari) ou d'Élam (Suse). En effet, si les Élamites ont leur civilisation et leur organisation politique propres, ils ne cessent, durant toute leur histoire, d'avoir des rapports culturels et économiques avec le Bas Pays et d'être en conflit avec ses cités.
3.5. Retard persistant du Nord

Durant cette période, la haute Mésopotamie reste en retard par rapport au Sud. Le meilleur critère en est l'usage de l'écriture, dont les signes prennent peu à peu l'allure de paquets de clous ou de coins (d'où le terme de « cunéiforme ») ; elle n'est adoptée au Dynastique archaïque que dans les agglomérations de la basse vallée de la Diyala et à Mari, sur l'Euphrate moyen. D'autres centres (Assour sur le Tigre moyen, tell Brak dans le bassin du Khabur), s'ils n'emploient pas l'écriture, ont pourtant reçu un tel apport technique et artistique du Bas Pays que l'on a cru y voir des comptoirs ou des dépendances de centres du Sud.
3.6. Grandeur et déclin du Dynastique archaïque

Sumer, statuette en calcaireSumer, statuette en calcaire
Pendant un certain temps, les guerres n'empêchent pas le progrès de la civilisation. C'est ce que montrent les trésors artistiques (vers 2500 avant J.-C.) trouvés à Our dans des tombes mystérieuses (pour des rois terrestres, comme le lougal Meskalamdoug, des substituts de dieux ou de vicaires ?), véritables monuments (fait rare dans le monde mésopotamien, où l'on n'attend rien d'un au-delà désolant) qui renferment des foules de serviteurs et surtout de servantes exécutés pour accompagner leur maître dans la mort.
Puis au xxive siècle avant J.-C. vient le temps des destructions sauvages et du premier Empire mésopotamien.
4. Les premiers Empires mésopotamiens (vers 2350-2004 avant J.-C.)

4.1. L'empire de Lougal-zagesi (vers 2350-2325 avant J.-C.)

Parti d'Oumma (cité voisine de Lagash), le Sumérien Lougal-zagesi impose sa domination brutale (vers 2350 avant J.-C.) du golfe Persique à la Méditerranée. C’est le premier « empire » constitué en Mésopotamie. Il ne dure pas vingt-cinq ans.
4.2. L’empire akkadien (vers 2325-vers 2190 avant J.-C.)

Vers 2325 avant J.-C., Lougal-zagesi est renversé par le Sémite Sargon, qui a fondé dans le nord de la basse Mésopotamie une cité-État, Akkad (ou Agadé), dont l'emplacement n'a pas encore été retrouvé. Son triomphe est aussi celui de son peuple, le dernier groupe sémitique sorti du désert. Sous la dynastie d'Akkad, on constate d'ailleurs un antagonisme entre ces Sémites d'Akkad et les citadins de Sumer (Sémites et Sumériens mêlés depuis longtemps), fiers de l'ancienneté de leur civilisation.
Une politique impériale
Plaque en forme de barbePlaque en forme de barbe
Sargon (début du xxiiie siècle avant J.-C., qui se dit « roi de Sumer et d’Akkad », se constitue un domaine encore plus vaste que celui de son prédécesseur, guerroyant dans les régions périphériques et étendant son contrôle sur une bonne partie des étapes et des voies du commerce de l'Asie occidentale. Et, si son empire fournit l'exemple à suivre pour tous ceux qui par la suite essaieront d'unifier le pays des Deux Fleuves, c'est qu'à la différence des rois du « Dynastique archaïque », vainqueurs de leurs voisins, et sans doute aussi de Lougal-zagesi, il a pratiqué une véritable politique impériale. Les rois d'Akkad, qui ont laissé souvent les vicaires vaincus à la tête de leurs villes, les font surveiller par des officiers de la cour akkadienne et colonisent les terres des vieilles villes en y constituant soit des établissements pour des groupes de leurs soldats, soit de grands domaines pour leurs principaux serviteurs. Et, pour mieux asseoir l'idée d'une domination supérieure à celle des rois de l'époque précédente, ils donnent un caractère divin à leur pouvoir : on les appelle « dieux » et on les représente avec la tiare à cornes (symbole de puissance jusque-là réservé à la divinité).
L’enrichissement matériel
Vase de pierre au nom de Naram-Sin
Vase de pierre au nom de Naram-Sin
Vase de pierre au nom de Naram-SinStèle de Naram-Sin
Le bouleversement politique s'accompagne d'une multiplication des grands domaines privés au détriment des communautés et des familles vivant dans l'indivision. Le commerce et l'artisanat profitent des facilités que l'unification politique apporte à la circulation. Disposant de ressources plus étendues que les chefs des cités-États, les rois d'Akkad peuvent susciter le progrès artistique : sans rompre avec la tradition, la sculpture et la glyptique produisent des chefs-d'œuvre (stèle de Naram-Sin, petit-fils de Sargon, commémorant sa victoire sur les montagnes du Zagros, tête de Ninive, sceau de Sharkali-sharri, fils de Naram-Sin).
Les mutations culturelles
La substitution partielle de l'akkadien (parler sémitique employé au pays d'Akkad) au sumérien comme langue écrite est à l'origine d'importants progrès culturels. Les scribes ne se contentent pas de lire en akkadien les idéogrammes d'origine sumérienne, comme on avait pu le faire jusque-là ; transcrivant leur langue sémitique où les mots sont généralement polysyllabiques (à la différence du sumérien, où prédominent les monosyllabes), ils sont amenés à étendre l'usage des signes phonétiques, qui rend l'écriture moins difficile. Les cunéiformes se répandent alors dans les pays soumis par Sargon ou chez ses adversaires : ils transcrivent de l'élamite, du hourrite (en haute Mésopotamie) et surtout de l'akkadien.
Pour en savoir plus, voir l'article cunéiforme.
Le Nord sort de l’ombre
En haute Mésopotamie, l'écriture, rare jusque-là, apparaît à Gasour (→ Nouzi au IIe millénaire avant notre ère, près de Kirkuk), à l'est du Tigre moyen, à Ninive, à Assour, au tell Brak, à Chagar Bazar (dans le bassin supérieur du Khabur) et dans les cités saintes du peuple hourrite, et elle contribue à restaurer l'unité culturelle de la Mésopotamie, qui avait disparu au Prédynastique final. Le nord de la Mésopotamie, qui porte alors le nom de Soubarou, commence à sortir de l'obscurité. Il est peuplé, pour une bonne part, de Sémites apparentés à ceux du pays d'Akkad et qui reconnaissent assez facilement la prédominance de la dynastie de Sargon : c'est le cas de ceux d'Assour (qui donnera son nom à l’Assyrie), fondée au xxvie siècle avant J.-C. comme cité sainte des tribus pastorales de la steppe qui s'étend à l'ouest du Tigre.
Quant aux Hourrites, généralement en guerre avec Akkad, descendus des montagnes, ils sont nombreux dans tout le piémont, et certains de leurs rois revendiquent la domination sur toute cette zone.
4.3. Chute d’Akkad et retour aux cités-États (vers 2190-2120 avant J.-C.)

L’arrivée des Goutis
Parvenue à un haut degré de richesse, la Mésopotamie ne cesse alors plus de susciter la convoitise des populations moins évoluées qui vivent dans les montagnes et les steppes désertiques de sa périphérie. Certains de ces voisins pratiquent surtout l'infiltration, venant par petits groupes se proposer comme soldats ou hommes de peine ; ils ont le temps d'assimiler la culture mésopotamienne avant de constituer une majorité dans la région où ils se fixent. D'autres peuples procèdent par des attaques brutales et viennent saccager les villes. Les rois d'Akkad ne peuvent cependant pas indéfiniment conjurer cette menace, car ils sont bien souvent occupés à réprimer les soulèvements des cités-États de Mésopotamie, qui renoncent difficilement à leur indépendance. S'ils endiguent la poussée des Sémites occidentaux, ou Amorrites, qui sortent du désert de Syrie, ils finissent par succomber devant les expéditions des peuples du Zagros, Loulloubi et Goutis, qui ruinent l'Empire akkadien (vers 2190 avant J.-C.).
Le retour aux cités-États
Tandis que les rois goutis imposent leur domination à une partie des centres mésopotamiens, le reste du pays des Deux Fleuves retourne au régime des cités-États indépendantes, parmi lesquelles Akkad, qui garde sa dynastie jusque vers 2154 avant J.-C. (voire 2140, selon Jean-Jacques Glassner, La Mésopotamie, Les Belles lettres, 2002).
C'est peut-être au temps des Goutis que se situe le règne de Goudea (2141-2122 avant J.-C.) à la tête de l'État de Lagash ; ce vicaire (ishshakou), qui ne paraît dépendre d'aucun souverain, a des relations commerciales avec une bonne partie de l'Asie occidentale, et sa richesse lui permet de multiplier les sanctuaires, d'où proviennent les dix-neuf statues en diorite noire que l'on a conservées de lui et qui inaugurent cet art habile et froid qui dure la majeure partie du IIe millénaire avant notre ère.
Vers 2120 avant J.-C., le roi d'Ourouk, Outou-hegal, bat et expulse le peuple détesté des Goutis, et le prestige de cette victoire lui vaut la prédominance sur tout le pays de Sumer.
4.4. La IIIe dynastie d’Our (vers 2110-2004 avant J.-C.)

La « renaissance néo-sumérienne »
Our-NammouOur-Nammou
À la mort d'Outou-hegal, c'est le roi Our-Nammou, fondateur de la IIIe dynastie d'Our, qui impose sa domination aux cités de basse Mésopotamie. C'est le point de départ d'un empire dont les limites sont mal connues : il doit comprendre toute la Mésopotamie et s'étend, sous le règne de Shoulgi, successeur d'Our-Nammou, à la Susiane et à une partie de l'Élam montagneux. On a qualifié cette période de néo-sumérienne. En fait, si la langue de Sumer est de nouveau employée dans les textes administratifs, le peuple de Sumer a disparu sous l'afflux massif des Sémites ; les populations de l'empire emploient des parlers sémitiques ou le hourrite, et le sumérien n'est plus que la langue de culture d'une élite sociale. Les rois d'Our reprennent et perfectionnent la politique impériale des maîtres d'Akkad. Dieux, ils reçoivent un culte de leur vivant et un hypogée monumental pour leur au-delà. C'est également à ce titre qu'Our-Nammou donne à son peuple un code qui est le plus ancien recueil de lois connu à ce jour.
L’empire d’Our
Ziggourat d'OurZiggourat d'Our
Les souverains d'Our multiplient les constructions sacrées, en particulier dans leur capitale, où ils développent l'ensemble consacré à Sin, le dieu-lune, y ajoutant une ziggourat (bâtiment fait de terrasses de taille décroissante superposées et couronné par un temple), la plus ancienne connue. L'empire d'Our se caractérise encore par un énorme appareil administratif qui contrôle les temples et les villes. Il y a encore dans chaque cité un vicaire, mais ce n'est plus qu'un fonctionnaire nommé par le roi, qui peut le muter. En revanche, sur le plan économique, les agents commerciaux des temples et du palais commencent à réaliser des affaires pour leur compte.
La chute d’Our
Les rois d'Our n'ont guère cessé de guerroyer dans le Zagros, mais un péril plus aigu s'annonce à l'ouest : à l'infiltration continue des Amorrites s'ajoutent leurs attaques. Et l'empire est déjà plus qu'à moitié perdu lorsque les Élamites prennent Our, qui est saccagée et dont le dernier roi est déporté (2004 avant J.-C.).
5. Les royaumes amorrites (vers 2004-1595 avant J.-C.)

Le mouvement des peuples se poursuit pendant deux siècles au moins : tandis que les Hourrites progressent en haute Mésopotamie vers le sud et vers l'ouest, les Amorrites arrivent en bandes successives, qui se fixent un peu partout au pays des Deux Fleuves, et finissent par adopter un dialecte akkadien.
5.1. La période d'Isin-Larsa

Ishbi-Erra, qui, comme gouverneur de Mari, avait trahi et dépouillé son maître, le dernier roi d'Our, bien avant la catastrophe finale, fonde à Isin, en Sumer, une dynastie qui prétend continuer la domination impériale des rois d'Our en reprenant le titre de « roi de Sumer et d'Akkad » ; mais cette dynastie se heurte à une dynastie amorrite installée à Larsa dans la même région. D'où le nom de période d'Isin-Larsa que l'on a donné à cette époque, où la Mésopotamie retourne au morcellement politique. Un peu partout, des chefs de guerre, le plus souvent des Amorrites à la tête de leur tribu, se proclament vicaires ou rois d'une cité. Il ne se passe pas de génération sans qu'un ou plusieurs de ces souverains n'entament la construction d'un empire qui s'écroule avant d'avoir achevé la réunification du pays des Deux Fleuves.
5.2. L’ancien âge assyrien

Mais l'histoire retient surtout les villes qui ont été des centres culturels ou économiques. Assour, redevenue indépendante à la chute de la IIIe dynastie d'Our, est gouvernée par des vicaires du dieu local Assour, portant des noms akkadiens (le dialecte assyrien est une forme dérivée de la langue d'Akkad). Ces princes participent au commerce fructueux que leurs sujets pratiquent en Anatolie centrale et dont témoignent les fameuses tablettes assyriennes de Cappadoce (xixe-xviiie siècle avant J.-C.). Leur dynastie est renversée (vers 1816 avant J.-C.) par un roitelet amorrite du bassin de Khabur, Shamshi-Adad Ier, qui se constitue un empire en haute Mésopotamie en dépouillant ou en soumettant les maîtres de nombreuses cités. En particulier, il met la main sur Mari (vers 1798 avant J.-C.), le grand centre commercial de l'Euphrate. Mais, à la mort du conquérant (vers 1781 avant J.-C.), son héritier, Ishme-Dagan Ier est réduit à la possession d'Assour. Zimri-Lim, le représentant de la dynastie précédente à Mari, se rétablit dans la royauté de ses pères et se rend célèbre par l'achèvement d'un palais qui est le plus beau de son temps.
5.3. L’ancien Empire babylonien

Hammourabi et la Iere dynastie de Babylone
Plaque de fondation au nom du roi HammourabiPlaque de fondation au nom du roi Hammourabi
La prédominance politique passe alors aux mains de Hammourabi (1793-1750 avant J.-C.), sixième roi de la dynastie amorrite (2004-1595 avant J.-C.), qui s'est établie à Babylone, grand centre économique du Bas Pays. Le Babylonien, qui avait d'abord été un allié subordonné de Shamshi-Adad Ier, finit par détruire, entre 1764 et 1754 avant J.-C., les principaux royaumes du pays des Deux Fleuves – Larsa, Mari, Eshnounna (à l'est de la basse Diyala) – et constitue un empire étendu à la majeure partie de la Mésopotamie ; mais c'est son code (282 articles reproduits sur une colonne de basalte de 2,25 m de haut et 70 cm de rayon à la base) et ses archives administratives qui l'ont rendu célèbre (→ code de Hammourabi).
Le déclin de l'empire
En effet, dès le règne de Samsou-ilouna, le fils de Hammourabi le royaume de Babylone est réduit au pays d'Akkad. L'obscurité tombe sur la haute Mésopotamie, de nouveau morcelée, et sur le pays de Sumer, qui, gouverné par une dynastie du Pays de la Mer (région de Basse Mésopotamie, proche du golfe ; vers 1735-1530 avant J.-C.), souffre du déclin provoqué par la remontée des sels, qui ruine la culture des céréales, et par la fin du commerce avec la civilisation de l'Indus, ruinée au xviiie siècle avant J.-C. Les peuples de la périphérie se remettent en mouvement, et, en 1595 avant J.-C., une expédition du roi hittite Moursili Ier met fin à la Ire dynastie de Babylone.
Le rayonnement culturel de Babylone
À la fin de la période qui s'achève ainsi, la grande ville du bas Euphrate est devenue le centre culturel de la Mésopotamie. C'est d'elle que rayonne maintenant le mouvement intellectuel né en Sumer, à la fin de la dynastie d'Our, au moment où l'on avait cessé de parler le sumérien. Les scribes avaient alors entrepris de mettre par écrit, pour la conserver, la tradition religieuse, scientifique et littéraire élaborée au cours des âges précédents dans le Bas Pays, et qui était restée presque entièrement orale. À partir du xviiie siècle avant J.-C., ils traduisent ces textes en akkadien, puis ils les adaptent au goût nouveau ou les complètent à l'aide des découvertes récentes. C'est l'époque où se développent les techniques divinatoires et en particulier l'astrologie et les autres sciences (mathématiques, médecine).
Pour en savoir plus, voir l'article Babylone.
6. Le temps des invasions : Hourrites, Kassites et Assyriens (vers 1595-934 avant J.-C.)

Les envahisseurs venus du Zagros à la fin de la période précédente se fixent en Mésopotamie. Les Aryens et le groupe hourrite qui leur est lié dans le Nord, les Kassites dans le Sud fondent ainsi deux États, le Mitanni et le Kardouniash, tandis qu’un Empire assyrien renaît peu à peu de ses cendres.
6.1. Les Hourrites et l’empire du Mitanni

Le Mitanni, qui reste très mal connu, est le premier à sortir de l'obscurité. C'est un empire à l'ancienne mode, où le roi d'un État plus puissant, le Mitanni, qui devait se trouver dans le bassin du Khabur, impose sa prédominance aux rois plus faibles dans une vaste étendue, du Zagros à l'Oronte, de l'Araxe au moyen Euphrate. Si elle ne correspond à une unité géographique, cette domination s'appuie sans doute sur l'appartenance de la plupart des rois qui y sont regroupés aux aristocraties aryenne et hourrite.
Le Mitanni s'est développé probablement dès le xvie siècle avant J.-C., à la faveur des migrations et de la disparition ou du recul des États plus anciens, et c'est au début du xve s.siècle avant J.-C. la principale puissance de l'Orient. Trop composite, il s'écroule lorsque ses voisins s'entendent contre lui : les Hittites, qui lui enlèvent son domaine syrien, et les Assyriens, qui annexent ses dépendances du bassin du Tigre moyen, se disputent après 1360 avant J.-C. la protection de ce qui reste de l'Empire mitannien, un État tampon dans l'ouest de la haute Mésopotamie, qui finit, vers 1270 avant J.-C., détruit et annexé par les Assyriens.
6.2. Les Kassites et le Kardouniash

Unification de la Babylonie
L'État du Kardouniash (ou Karandouniash) a été fondé à Babylone (peut-être à la disparition de la dynastie amorrite) par des Kassites. Ce peuple du Zagros avait tenté d'envahir le pays des Deux Fleuves en 1741 avant J.-C. et, battu par le fils de Hammourabi, il avait, semble-t-il, fondé un royaume quelque part en Mésopotamie. Après leur installation à Babylone, les Kassites réunifient le Bas Pays – que l’on peut, désormais, appeler la Babylonie – en détruisant la dynastie du Pays de la Mer (vers 1530 avant J.-C.).
Une puissance faible
On ne connaît aucun texte ni monument des rois kassites avant le xive siècle avant J.-C., ce qui indique une économie affaiblie et probablement une monarchie sans grand pouvoir. C'est d'ailleurs avec ce caractère qu'elle se manifeste ensuite : les rois kassites concèdent de grands domaines immunitaires à leurs officiers et accordent le même privilège aux cités ; on comprend alors qu'aucune d'elles ne conteste plus la suprématie de Babylone ni ne tente de sécession. Les Kassites, aristocratie militaire issue d'un peuple peu évolué, abandonnent assez vite leur culture propre, et le monde babylonien, dès le retour à la prospérité économique, reprend son activité intellectuelle. Du xive au xie siècle avant J.-C., les scribes constituent les collections, désormais canoniques, de textes rituels, divinatoires ou se rapportant aux autres sciences du temps et donnent également une forme définitive aux œuvres littéraires, comme le Poème de la Création ou l’Épopée de Gilgamesh.
6.3. Le moyen Empire assyrien

Unification de l'Assyrie
La cité-État d'Assour était entrée dans l'obscurité dès la mort de Shamshi-Adad Ier (vers 1781 avant J.-C.). Morcelée entre des dynasties rivales, elle avait dû subir des dominations étrangères. Assour venait à peine de se libérer de l'emprise du roi mitannien quand Assour-ouballit Ier (1366-1330 avant J.-C.) entreprend d'exploiter la crise dynastique du Mitanni et, retournant la situation, devient le protecteur du nouveau roi mitannien. Assour-ouballit, qui a pris le titre de roi pour les territoires étrangers au domaine de la cité d'Assour qu'il a conquis, et ses premiers successeurs dépassent le cadre de la cité-État originelle et créent ce que les modernes appellent l'Assyrie, un royaume centralisé comme celui de Hammourabi, bientôt un empire comprenant, outre Assour, les villes du « triangle assyrien » (entre le Tigre et le Zab supérieur), dont la plus importante est Ninive, puis tout le bassin du Tigre moyen et, au xiiie siècle avant J.-C., ce qui reste du Mitanni. Les Hourrites, qui formaient une part importante de la population des pays conquis, se laissent sémitiser.
Une royauté fragile
Cette expansion s'accompagne de cruautés ostentatoires et de déportations inspirées par le nationalisme et destinées à détruire toute volonté de résistance. Ces succès ne diminuent guère l'instabilité politique à Assour : la royauté est sacrée, mais non la personne du roi, qui doit déjouer les intrigues de ses parents, des prêtres, qui désignent le nouveau souverain, et de l'aristocratie guerrière, qui monopolise les offices auliques et les gouvernements provinciaux, et dont la guerre accroît la richesse et la puissance.
6.4. La rivalité entre Assyriens et Babyloniens (vers 1320-1120 avant J.-C.)

Une lutte interminable
Dans la seconde moitié du xive siècle avant J.-C., alors que la Mésopotamie ne compte plus que deux grands États, s'amorce le vain conflit qui va affaiblir ces royaumes. Pour des raisons de prestige, pour imposer chacun sa prédominance à l'autre, les rois de Babylone et d'Assour se lancent dans une série de guerres décousues auxquelles participe bientôt l'Élam, à peine libéré de la tutelle babylonienne et qui, pour des raisons géographiques, réserve ses coups au Bas Pays. Même le triomphe de l'Assyrien Toukoulti-Ninourta Ier (1245-1208 avant J.-C.), qui a capturé le souverain kassite et s'est proclamé roi de Babylone, n'a pas de lendemain. De même, après que les raids successifs des Assyriens et des Élamites ont mis fin à la dynastie kassite (1153 avant J.-C.), la Babylonie se relève sous une dynastie à noms sémitiques, la 2e dynastie d'Isin, et une victoire de son roi Naboukoudour-outsour Ier (appelé par les modernes Nabuchodonosor Ier) provoque la fin du grand royaume d'Élam (vers 1115-1110 avant J.-C.).
L’émulation culturelle
Ces conflits n'entravent ni le commerce ni les échanges culturels. La Babylonie exerce une influence puissante sur tout l'Orient, et surtout sur son voisin du Nord. Les Assyriens, qui montrent une certaine originalité dans l'élaboration de leur premier art, sont par contre les admirateurs et les fidèles disciples des scribes babyloniens et les adorateurs fervents des divinités du Sud.
6.5. Le temps de la confusion (vers 1120-934 avant J.-C.)

L’arrivée des Araméens
Le mouvement migratoire des Sémites du désert de Syrie à destination des pays agricoles, qui n'avait jamais complètement cessé, reprend toute sa force avec un nouveau groupe linguistique, les Araméens. Affaiblis par leur interminable conflit, mal préparés à combattre ces pillards insaisissables, les royaumes de Babylonie et d'Assyrie déclinent sous l'effet du harcèlement des nomades. L'Assyrie, en particulier, qui portait encore la guerre sous Toukoultiapil-Esharra Ier (→ Téglath-Phalasar Ier) [1116-1077 avant J.-C.] jusqu'au lac de Van et en Phénicie, perd peu après tout l'ouest de la haute Mésopotamie. Bientôt, la situation est la même pour les deux États : les citadins sont bloqués dans les villes, les bandes araméennes courent les campagnes, dont ils massacrent les habitants terrorisés et transforment les riches zones de culture en steppes pastorales.
Les petits royaumes araméens
Puis, à la fin du xie siècle ou au xe siècle avant J.-C., les groupes araméens se fixent, chacun formant la garnison d'une cité dont son chef devient le roi. En Babylonie, ce phénomène a été facilité par l'attitude des notables des villes livrées à elles-mêmes par une royauté que dégradent des usurpations répétées : ceux-ci cèdent en échange de leur tranquillité une partie de leurs terres aux envahisseurs ; en certains districts de Sumer, l'afflux des Araméens, auxquels des Arabes se joignent au viiie siècle avant J.-C., ne cesse jamais et absorbe les populations plus anciennes ; mais, partout, les petits royaumes tribaux qui se forment reconnaissent pour souverain le roi de Babylone.
7. Les nouveaux Empires assyrien et babylonien (934-539 avant J.-C.)

7.1. Le nouvel Empire assyrien (934-605 avant J.-C.)

Une politique de conquêtes systématiques
Au xe siècle avant J.-C., les deux États mésopotamiens connaissent un renouveau économique et intellectuel. Mais les Assyriens ne s'en tiennent pas là et se consacrent à la conquête, montrant dès le règne d'Assour-dân II (934-912 avant J.-C.) plus de méthode qu'on ne leur en prête pour cette époque. Outre les opérations de police contre les Araméens qui infestaient les campagnes et la guerre de prestige contre Babylone, traitée avec mansuétude par respect pour ses dieux, l'armée assyrienne attaque les peuples guerriers et arriérés des montagnes ainsi que les riches cités araméennes. Pour ces dernières, elle opère progressivement, ne les annexant qu'après des années d'extorsion du tribut.

Ninive, bas-relief
Ninive, bas-relief
Ninive, bas-reliefNinive, frise du palais d'Assourbanipal
Cependant, la conquête assyrienne comporte des pauses et des reculs qui semblent liés à la faiblesse de tel roi, mais qui sont dus plus probablement à une crise interne, qui n'est résolue que provisoirement par l'arrivée au pouvoir d'un prince énergique. Au ixe siècle avant J.-C., Assurnazirpal II (883-859 avant J.-C.) est le premier à franchir l'Euphrate et à aller rançonner les cités du couloir syrien, mais il faut encore plus d'un demi-siècle pour que ses successeurs achèvent l'annexion des États araméens de la haute Mésopotamie occidentale.
Les faiblesses de l'Empire
Depuis Assurnazirpal II, les rois résident à Nimroud, au sud-est de Ninive, ville neuve peuplée de déportés dont on n'avait pas à craindre qu'ils exigent des immunités. Cette fragilité du pouvoir royal, que la propagande dissimule aux yeux des étrangers, impressionnés par les reliefs des palais montrant la majesté du souverain, est mise en lumière par la guerre civile assyrienne (828-823 avant J.-C.), qui oppose deux groupes sociaux se disputant les profits de la guerre et divise la famille royale. Durablement affaiblie, l'Assyrie a beaucoup de mal à endiguer la poussée du royaume d'Ourartou, qui, par le bassin du Tigre supérieur, menace le cœur de l'Assyrie.
La soumission de la Babylonie
Toukoultiapil-Esharra III (745-727 avant J.-C.), le Téglath-Phalasar III de la Bible, qui restaure le pouvoir royal et réforme l'armée, reprend la conquête avec plus d'acharnement. Mais il est sans doute mal inspiré quand, inquiet de la faiblesse croissante de la monarchie babylonienne, qui pourrait tenter un Élam en plein renouveau, il s'empare de la Babylonie et se proclame roi dans sa capitale (728 avant J.-C.). Au lieu d'un État miné par l'anarchie, ses successeurs doivent affronter les révoltes des citadins et des Araméens, soutenus par les Élamites. Les rois assyriens essaient toutes sortes de solutions : tantôt le titre de roi de Babylone est porté par le souverain d'Assyrie, par un de ses fils ou par un Babylonien dont on escompte la docilité, tantôt on supprime ce titre et avec lui les dernières apparences d'indépendance. Les révoltes exaspèrent les Assyriens et, par deux fois (689 avant J.-C. et 648 avant J.-C.), Babylone est dévastée.
Un colosse aux pieds d’argile
Sous Sargon II (722/721-705 avant J.-C.) et ses descendants les Sargonides, Sennachérib (705-680 avant J.-C.), Assarhaddon (680-669 avant J.-C.) et Assourbanipal (669-v. 627 avant J.-C.), l'Empire assyrien paraît à son apogée avec un domaine de plus d'un million de kilomètres carrés, qui va jusqu'à Suse en Élam et à Thèbes en Égypte, avec ses palais ornés de reliefs et de fresques, où les rois entassent leurs collections d'ivoire et de tablettes. Une civilisation impériale où domine l'apport babylonien se répand dans toute l'Asie occidentale, effaçant les particularismes locaux. Mais le peuple assyrien, décimé par la guerre, ne fournit plus que l'encadrement de ces foules de prisonniers de guerre avec lesquels on remplit les rangs de l'armée ou des chantiers et de ces déportés qui constituent maintenant la majorité de la population dans chacune des régions de l'Empire.
La fin de l’Assyrie (626-605 avant J.-C.)
En 626 avant J.-C., Nabopolassar, membre de la grande tribu araméenne des Chaldéens, se révolte contre la domination assyrienne et devient roi de Babylone, fondant la dernière dynastie de la grande cité. Cependant, il faut l'intervention du roi mède Cyaxare pour que les capitales de l'Assyrie soient détruites (Assour en 614 avant J.-C., Ninive en 612 avant J.-C.) et que son armée soit dispersée (605 avant J.-C.). Le peuple assyrien anéanti, son héritage va essentiellement à la dynastie chaldéenne de Babylone, qui reconstitue un empire en Asie occidentale, tandis que les Mèdes, dominant l'Iran, se contentent de la moitié nord de la haute Mésopotamie, où ils campent au milieu des ruines.
7.2. Le dernier Empire babylonien (605-539 avant J.-C.)

Porte d'Ishtar, BabylonePorte d'Ishtar, Babylone
C'est au contraire une grande époque pour la Babylonie : la capitale est couverte de monuments splendides par le roi Nabou-koudourri-outsour II (605-562 avant J.-C.), le Nabuchodonosor II de la Bible ; les scribes continuent à recopier les textes canoniques et font progresser l'astronomie.
Mais, par ailleurs, le babylonien, qui n'est plus qu'une langue de culture, recule devant l'araméen, qui est maintenant la seule langue parlée dans le pays.
Affaiblie par les usurpations qui suivent la mort de Nabuchodonosor et par la politique déroutante du roi Nabonide (556-539 avant J.-C.), la Babylonie, qui a récupéré le nord de la haute Mésopotamie à la chute de l'Empire mède, détruit par le souverain perse, l'Achéménide Cyrus II (550 avant J.-C.), ne résiste guère à celui-ci qui se fait proclamer roi de Babylone (539 avant J.-C.).
8. Les dominations étrangères, des Perses à l’Islam (539 avant J.-C.-637 après J.-C.)

8.1. Les Achéménides (539-331 avant J.-C.)

La haute Mésopotamie, réunie à la Syrie dans une satrapie d'Assyrie, reste soumise à ses nouveaux maîtres. Au contraire, la Babylonie, qui a gardé sa cohésion nationale, se soulève à l'avènement de Darios Ier ; deux prétendants se faisant passer pour le fils de Nabonide sont successivement écrasés par l'armée perse en 522 et en 521 avant J.-C. Deux nouvelles insurrections de ce type ont lieu sous Xerxès Ier (482 avant J.-C.). L'Achéménide se venge en abandonnant son titre de roi de Babylone, en déportant l'idole de Mardouk (le dieu de la capitale) et en abattant la muraille de Babylone. La grande cité n'est plus que le chef-lieu d'une satrapie – la plus taxée de l'Empire ; le commerce et la banque (souvent pratiquée par des Juifs) resten

 
 
 
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