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DÉVELOPPEMENT ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME NERVEUX

 

 

 

 

 

 

 

DÉVELOPPEMENT ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME NERVEUX

Conférence du 24 janvier 2000 par Alain Prochiantz. On découvrit dans les années 1970, chez une mouche, la Drosophile, des mutations conduisant au remplacement de tout ou partie d'un organe par un autre organe. On observa, par exemple, des transformations de type antenne-patte, aile-balancier, ou aile-oeil. Ces mutations ont été dites homéotiques, l'organe d'un segment étant remplacé par l'organe homologue d'un autre segment. Les gènes homéotiques codent pour des facteurs de transcription qui, en se fixant sur des séquences promotrices, régulent l'expression d'autres gènes. Ces observations ont conduit à découvrir, dans tous les embranchements du règne animal, la présence de gènes présentant de fortes homologies de structure avec les gènes homéotiques de la Drosophile et de conclure que ces gènes régulent le développement morphologique des vertébrés. Par ailleurs, ces homologies entre gènes de vertébrés et d'arthropodes doublées de similitudes dans leur organisation chromosomique "démontrent" l'existence d'un ancêtre commun aux vertébrés et aux arthropodes qui aurait vécu il y a environ 600 millions d'années. Tout en traçant notre lien de parenté avec les arthropodes, cette conférence montre aussi à quel point nous sommes différents de ces cousins dont nous nous sommes séparés il y a environ 600 millions d'années. On voit donc apparaître ici deux stratégies d'adaptation. Chez les invertébrés, la forme adulte de l'organisme et ses comportements sont presque présents dans la structure génétique. Chez les vertébrés, les stratégies de développement, tout en définissant un plan contraignant, laissent une grande liberté aux détails de la construction cérébrale dont des aspects importants de la structure se modifient tout au long de l'existence. De ce fait, chez les vertébrés et au plus haut point chez l'homme, c'est l'histoire même des individus qui s'inscrit dans la structure cérébrale par un processus ininterrompu d'individuation.

Le développement et l'évolution du système nerveux.

Notre propos traitera d'embryologie, pas d'embryologie humaine bien que certains aspects du développement des autres espèces soient aussi valables pour celui de l'Homme. Nous avons, en effet, beaucoup à partager avec les autres animaux, voire avec les champignons et les plantes.

S'il fallait donner une définition de l'embryologie elle serait relativement simple. L'embryologie est l'ensemble des processus qui mènent de l'oeuf, à partir du moment où le spermatozoïde et l'ovule l'ont formé, à l'organisme adulte ou imago. Ainsi sous le terme d'embryologie, deux processus se confondent ou se superposent :

- fabriquer l'imago c'est-à-dire faire un individu dont la forme est représentative de l'espèce ;

- fabriquer un individu particulier qui diffère des autres membres de son espèce.

Ces deux processus sont inscrits l'un dans l'autre et, selon l'espèces ou l'embranchement – la place occupée dans l'histoire de l'évolution - ils n'ont pas forcément la même importance. Fondamentalement l'embryologie est question de formes et question de temps. À partir d'un oeuf se construit un individu dont la forme, l'imago, est spécifique de l'espèce. Un oeuf c'est une cellule alors qu'un individu c'est plusieurs milliards de cellules. Il y a donc une immense prolifération du nombre de cellules à partir de l'oeuf. Par ailleurs, un individu est constitué de plusieurs types de tissus, musculaire, nerveux, hépatique. Ces tissus se forment à partir de trois feuillets embryonnaires : le mésoderme donnera les muscles et les os, l'ectoderme le système nerveux et la peau, l'endoderme le tube digestif, les poumons et les glandes annexes du tube digestif comme le foie, le pancréas, la thyroïde.

Les résultats sur la première étape de formation du tissu nerveux - l'induction neurale - ont été initialement obtenus chez le crapaud Xénope mais ils sont également vrais pour le poulet, et dans les grandes lignes pour la souris et l'Homme. Au départ, à partir de la cellule initiale, une phase de prolifération mène au stade de la morula, puis de la blastula qui précède la gastrulation et l'induction neurale. La blastula est une sorte de boule creuse avec des cellules à la surface. Le système nerveux va se développer à partir de la surface extérieure dorsale de cette boule. Au cours de la gastrulation cet ectoderme dorsal est induit à devenir de l'ectoderme neural c'est-à-dire à former du système nerveux.

L'induction neurale a été découverte dans les années 1930-40 par Mangold et Spemann à la suite d'expériences dans lesquelles ils greffaient des morceaux d'embryon de Triton blanc dans un embryon de Triton noir, histoire de distinguer tissu receveur et tissu donneur. En prenant une région particulière du Triton blanc et en la greffant dans la région ventrale d'un oeuf de Triton noir, ils se sont rendus compte qu'ils dorsalisaient la région ventrale de ce dernier. Au lieu d'avoir un Triton normalement constitué ils ont obtenu un Triton à deux dos dans lequel il n'y avait pas de partie ventrale. Ils avaient induit la formation d'un deuxième système nerveux central.

À la suite de ces expériences, de nombreux chercheurs ont cherché à identifier la nature moléculaire de ces inducteurs neuraux présents dans cette petite région inductrice et mésodermique qui mise au contact de la région ventrale modifie destin embryonnaire. Cette recherche des inducteurs neuraux qui dure depuis plus de 60 ans n'est - à ce jour - toujours pas totalement aboutie. Dans la suite du développement, le triton s'allonge et à la surface dorsale se constitue une plaque neurale. Cette plaque neurale ne va donner naissance au tube neural qu'après avoir été internalisée par l'embryon.

Dans le développement du système nerveux, comme dans le développement en général, l'information positionnelle joue un rôle très important. On peut voir le système nerveux comme une plaque, une feuille sur laquelle on peut tracer un quadrillage. Une fois qu'elle s'est refermée en tube, la plaque reste quadrillée. Il y a une orientation dorso-ventrale et une orientation antéro-postérieure. Si chacun de ces carrés était défini par l'expression d'une catégorie de gènes, d'un algorithme génétique, on serait capable de définir la position de n'importe quelle cellule à partir de la connaissance des gènes qu'elle exprime. Considérer le système nerveux comme un plan et considérer ce problème de l'information positionnelle comme le problème d'un quadrillage du plan peut aider à comprendre énormément de questions qui sont posées sur la construction du système nerveux.

L'information positionnelle signifie qu'une cellule dans une région donnée, quand le tube neural s'est fermé et différencié, donnera naissance à un type de cellules bien déterminé par exemple spécifique du cortex frontal ou du bas de la moelle épinière. Pourtant, au départ, au moment où la plaque neurale se forme, les cellules sont extrêmement semblables. Beaucoup plus tard, les réseaux neuronaux seront construits. Les neurones sont amenés à envoyer un axone, un prolongement, vers une autre région pour former une synapse, un contact neuronal. La navigation du cône de croissance, la tête chercheuse du neurone, doit être précise. Le cône de croissance doit être capable, dans l'espace tridimensionnel du système nerveux, de retrouver une cible parfois très éloignée. Le quadrillage de l'information positionnelle est fondamental pour que le cône de croissance connaisse sa position et sache où il doit se diriger et quand il doit s'arrêter, c'est-à-dire pour construire un système nerveux fonctionnel.

Nous allons maintenant faire une parenthèse sur le concept d'information positionnelle et ce qu'on appelle les gènes de développement. Les gènes sont d'importance variable. Ainsi les gènes qui contrôlent la forme et la couleur des poils, la couleur des yeux, sont importants d'un point de vue esthétique mais ne sont pas fondamentaux pour ce qui est du développement de l'embryon. Par contre, il existe des classes de gènes dits de développement, qui - eux – sont essentiels pour ce qui est de la forme de l'embryon et de son développement.

La découverte de gènes dont les mutations modifiaient la forme a constitué une avancée considérable dans la compréhension de comment se construit un organisme. La grande percée a eu lieu chez la mouche du vinaigre, Drosophile, chez laquelle des généticiens du début du siècle, surtout l'école de Morgan, ont démontré que certaines mutations pouvaient transformer un organe en un autre, par exemple l'oeil en aile (mutation ophtalmoptera). Ces mutations monstrueuses suggérèrent que les gènes mutés étaient responsables du développement morphogénétique de ces petits amas de cellules embryonnaires qu'on appelle des disques imaginaux à l'origine des différents organes de la mouche. Ces gènes ont été clonés chez la mouche. Ils ont été appelés homéogènes parce que leur

mutation entraîne la transformation de l'organe d'un segment de la mouche en l'organe homologue d'un autre segment (l'aile en oeil ou l'antenne en patte, par exemple). L'existence de ces gènes lie le développement à l'évolution. En effet la compréhension de la transformation d'un organe en un autre permet de comprendre comment se sont formés des monstres au cour de l'évolution. Il est probable que beaucoup de processus de création de nouvelles espèces (les monstres qui ont réussi) sont liés à des modifications du nombre, du lieu d'expression et surtout du temps d'expression de ces gènes qui influent sur le développement morphologique des animaux et des plantes. Ces gènes homéotiques codent pour des facteurs de transcription c'est-à-dire des protéines qui restent dans le noyau des cellules et qui régulent l'expression d'autres gènes. Ce sont des gènes architectes qui contiennent le plan de la mouche et décident de la position des différents organes. Ils régulent d'autres gènes qui, eux, fabriquent réellement les organes. Ces gènes de développement sont au centre de réseaux génétiques. Une des grandes difficultés de la biologie du développement aujourd'hui est de comprendre quels sont les gènes dont l'activité est régulée par les gènes de développement, lesquels sont maintenant pratiquement tous identifiés dans le règne animal.

Chez la mouche, ces gènes de développement sont disposés le long d'un chromosome. Une chose tout à fait étonnante est que les gènes "en avant" du chromosome, en 3', sont exprimés dans les régions les plus antérieures de l'animal et que les gènes en 5', "en arrière" du chromosome, sont exprimés dans les régions les plus postérieures. D'une certaine façon la mouche est représentée sur le chromosome par la disposition des gènes de ce complexe homéotique. Quand le génome passe de la génération x à la génération x+ 1, le plan de l'animal, de l'imago, qu'il va falloir construire est transmis.

Ces facteurs de transcription, produits de ces gènes de développement - gènes du complexe HOM - se fixent à l'ADN car ils doivent réguler l'expression d'autres gènes. Ils se fixent par une petite séquence d'environ 60 acides aminés, appelée l'homéodomaine et codée par l'homéoboîte. Tous ces gènes chez la mouche ont pratiquement la même homéoboîte. Ils constituent donc une famille. Grâce à cette signature de l'homéoboîte cette même famille a été retrouvée chez la souris et chez l'Homme. Chez les vertébrés, ces gènes sont disposés non pas sur un mais sur quatre chromosomes et les gènes de ces quatre complexes HOM/Hox ont à peu près les mêmes propriétés que ceux de la mouche. Ils sont exprimés à l'avant de l'embryon quand ils sont en 3' du chromosome et à l'arrière des axes embryonnaires quand ils sont en 5' du chromosome. En analysant les gènes de mouche et de souris il a été observé que le remplacement d'un gène de mouche par un gène placé à la même position sur un des quatre chromosomes de la souris, permet de réparer la mouche. Cette complémentation marque une homologie à travers l'évolution ou encore une orthologie. À partir de la constatation de ces orthologies, on peut tirer la conclusion qu'il existe un ancêtre commun aux arthropodes et aux vertébrés. Cet ancêtre aurait vécu il y a 600 millions d'années, soit avant l'explosion du précambrien. L'évolution a alors suivi deux voies différentes l'une vers l'embranchement des arthropodes, l'autre vers celui des vertébrés. Deux duplications chromosomiques ont probablement permis la formation des quatre complexes qui sont la signature des vertébrés.

Les gènes que nous venons de décrire n'influent pas directement sur le système nerveux antérieur. Les chercheurs qui s'intéressent au cerveau ont donc utilisé une stratégie très proche en cherchant des gènes s'exprimant dans les ganglions céphaliques de la mouche. Ils ont trouvé à nouveau des gènes de la même famille, codant pour des facteurs de transcription, par exemple orthodenticle ou otd. Ayant découvert ces gènes ils ont regardé si des gènes homologues existaient dans le cerveau de la souris et en ont trouvé. Par exemple otx 1 et otx 2 qui sont assez proches de otd, s'expriment aussi dans les régions antérieures du cortex de la souris et de l'Homme et sont capables de complémenter otd. La suppression, chez la mouche, du gène otd entraîne la perte des structures céphaliques antérieures et, pour certains allèles de otd, des ocelles (trois "yeux" dorsaux). Son remplacement par otx 1 ou otx 2 de souris ou d'Homme restitue à la mouche sa morphologie normale. A l'homologie de structure et de site d'expression dans les régions antérieures du système nerveux, s'ajoute donc la

complémentation fonctionnelle. Ceci suggère très fortement que les régions antérieures existaient chez l'ancêtre commun et peut être même avant. Ainsi l'idée très développée que la céphalisation est un processus tardif de l'évolution est une idée fausse. La génétique du développement nous démontre qu'en fait la tête était là depuis le départ, au moins depuis le moment où nous nous sommes séparés de nos lointains cousins les arthropodes. Pourquoi avons-nous deux gènes otx 1 et otx 2 ? La génétique de la souris est suffisamment évoluée pour qu'on puisse retirer ou ajouter un gène à n'importe quel moment du développement. On parle de perte ou gain de fonction. La délétion de otx 2 donne une souris sans tête, c'est-à-dire sans système nerveux antérieur. C'est létal. Celle de otx 1 laisse un cerveau presque normal mais aminci du côté temporal et la souris fait des crises d'épilepsie. Surtout, elle perd le canal latéral semi-circulaire de l'oreille interne, structure qui au cours de l'évolution apparaît avec la transition des poissons sans machoires (agnathes) aux gnathostomes. Si on remplace otx 2 par otx 1 la souris commence à faire son système nerveux

mais elle ne le maintient pas. Si on remplace otx 1 par otx 2 on restitue presque toutes les fonctions de otx 1 sauf le développement du canal latéral semi-circulaire de l'oreille interne. Cela suggère qu'au départ il y avait uniquement otx 2 (orthologue de otd). Une duplication de otx 2 a rendu possible la formation de son paralogue otx 1 dont l'évolution a apporté des gains de fonction associés au passage des agnathes aux gnathostomes. L'étude des gènes de développement permet donc non seulement de comprendre le développement des organismes mais aussi l'évolution des espèces. Une nouvelle discipline est née "l'évodévo" ou développement/évolution. Il existe une très grande quantité de gènes exprimés dans les régions antéro-postérieures et dorso-ventrales du système nerveux de telle sorte que si on prend un système nerveux aplati sur lequel on trace un quadrillage, chaque région peut être définie par une combinatoire d'expression de gènes de développement. C'est en fonction de cette information positionnelle que les cellules vont donner naissance aux différents organes.

L'étape suivante dans la formation du système nerveux après la formation du tube neural à partir de la plaque neurale qui s'est refermée, c'est de le faire grossir. À partir d'une ou deux rangées de cellules il faut construire, par exemple, un cortex de 2 m2 chez Homo sapiens. Les différentes zones de cette surface ne sont pas homogènes, elles ne sont pas dévolues aux mêmes fonctions : il existe des aires olfactives, des aires associatives, des aires auditives, des aires visuelles, etc. Au cours de l'évolution la surface du cortex a augmenté et s'est régionalisée. Plis et circonvolutions permettent de tout empaqueter dans la boîte crânienne. L'augmentation générale de surface et celle ds surfaces dévolues aux fonctions spécifiques ont probablement varié à la suite de mutations de gènes de développement régulant prolifération et survie cellulaire dans des régions particulières. Par exemple, les surfaces allouées aux fonctions dites cognitives, associatives, ou permettant la maîtrise du langage, ont augmenté chez Homo sapiens plus que chez nos cousins les primates. Après la régionalisation du système nerveux, la deuxième période de ce développement permet donc la multiplication des cellules, l'organisation du cortex en six couches, la formation de toutes les structures cérébrales, la navigation axonale, la formation des synapses. Les mécanismes d'orientation d'une cellule migrante ou du cône de croissance d'un axone d'une cellule nerveuse ne sont pas encore connus même si nous savons qu'ils ont partie liée avec la lecture de l'information positionnelle, donc l'expression des gènes de développement.

Nous allons maintenant passer à des aspects un peu plus généraux. Nous avons vu tout à l'heure que nous avions au niveau chromosomique quatre représentations du corps, ce qu'on appelle des homonculus génétiques ou représentations génomiques du plan du corps. Ce plan du corps est marqué par la localisation de ces gènes de développement le long des chromosomes et par leur domaine d'expression spatio-temporel. Le cerveau est lui-même l'objet d'une construction génétique soumise à une régulation épigénétique. Par exemple, il existe dans le cortex sensoriel - sous la forme de réseaux neuronaux - une représentation du corps (donc à caractère génétique car reproduisant l'imago), mais cette représentation est déformée épigénétiquement car les régions les plus innervées sur le plan sensoriel mobilisent le plus grand nombre de neurones. La stimulation sensorielle "anime et déforme" un ensemble de neurones qui sont, pas exemple, "la main dans le cerveau".

Les réseaux neuronaux sont construits en fonction, à la fois d'une contrainte génétique, il s'agit d'un homonculus spécifique de l'espèce, et d'un environnement sensoriel. Si on coupe les afférences sensorielles, on perd le développement correct des représentations du corps au niveau du cortex. Si, chez la souris, à la naissance, on ôte les vibrisses (récepteurs sensoriels sur le museau), ils ne seront pas représentés dans le cortex, le membre sera absent. L'usage et l'influence de l'environnement sur tous les systèmes sensoriels modifient donc pour chaque individu la construction de ses représentations au niveau du système nerveux central. C'est ce qu'on appelle l'épigenèse, processus par lequel bien qu'appartenant à une même espèce, tous les individus sont différents. Le cerveau est capable d'engrammer une histoire individuelle, affective, sensorielle, une histoire de nos stimulations par le milieu. Plus nous sommes stimulés, plus nous développons des constructions épigénétiques variées. C'est vrai chez l'enfant, chez l'adolescent mais aussi chez l'adulte. En effet, une des grandes innovations des vertébrés est d'avoir gardé un système nerveux embryonnaire chez l'adulte. Ainsi, l'épigenèse se construit-elle à partir des nouveaux neurones, des arborisations neuritiques qui se

déforment, des synapses qui se font et se défont. Elle est un processus d'adaptation qui se

poursuit toute la vie. Le fait d'être du côté des arthropodes ou de celui des vertébrés a des conséquences fondamentales sur les stratégies d'adaptation. Nous partageons beaucoup avec les mouches, avec les vers et toute les études sur ces organismes sont extraordinairement importantes pour comprendre comment fonctionne et comment se construit le système nerveux des vertébrés.

Mais les logiques de nos stratégies adaptatives sont très différentes. Dans l'embranchement des arthropodes, notre grand concurrent au niveau de l'évolution, l'adaptation se fait de façon presque purement génétique. Il y a très peu d'individuation. La construction de l'individu n'est jamais très éloignée de celle de son génome. Chez les vertébrés, et encore plus chez nous parce que nous avons des systèmes de communication qui sont très riches de sens, le langage en particulier, l'adaptation ne se fait pas au niveau de la sélection de clones, elle se fait au niveau de la variabilité de l'individu, de son évolution.

L'adaptation se fait par individuation

Le système nerveux d'un individu au temps t et au temps t+δt n'est pas le même, il a évolué. L'intensité des synapses, leur nombre, le nombre de cellules, l'organisation des réseaux auront varié. Cette variation de structure biologique correspond à une évolution de l'objet, une adaptation à son milieu, une réponse à son histoire. Il y a donc de la plasticité chez l'adulte, dans certaines limites bien entendu, et cette plasticité est très certainement liée à l'expression continuée de ces même gènes de développement qui sont responsables non seulement de l'évolution, non seulement de la mise en place des grandes structures cérébrales (cortex, cervelet, moelle épinière), mais aussi de la plasticité permanente du système morphologique y compris à l'âge adulte.

La plasticité implique que de nombreuses cellules naissent, se différencient et meurent. Il existe des cellules souches dans la peau, le foie, le système hématopoïétique/immunitaire mais aussi dans le système nerveux central. Les premières ont été trouvées dans le bulbe olfactif : les interneurones du bulbe olfactif se reproduisent environ une fois par mois à partir de la zone sous-ventriculaire qui est une structure corticale située à l'avant du cerveau dont les cellules migrent pour aller envahir le bulbe. Ces cellules souches prolifèrent, migrent, se différencient comme des neurones normaux au cour du développement embryonnaire. Puis des cellules souches ont été repérées dans l'hippocampe, une structure à l'arrière du cortex qui est d'une grande importance pour la mémoire spatiale. Dans nombre de maladies neurodégénératives il y a perte de cellules au niveau de l'hippocampe. Très récemment des cellules souches ont été trouvées dans le cortex associatif du macaque. C'est une des régions la plus importante pour la mémorisation, la construction de souvenirs, pour la pensée d'une certaine façon. Le développement embryonnaire se poursuit donc sous une forme silencieuse chez l'adulte par la génération de nouvelles cellules souches qui vont migrer, se différencier et s'insérer dans des nouveaux réseaux neuronaux de la naissance à la mort. C'est une des bases de notre capacité à apprendre, de notre force d'adaptation, au niveau individuel, face aux défis qui nous sont apportés par les modifications de l'environnement physique et affectif. La question du vieillissement est donc à reposer. Pour certains, le vieillissement est une perte de fonctions à partir d'un âge idéal, une sorte de gain d'entropie catastrophique. Il peut être vu, aussi,

comme l'accumulation d'accidents du développement chez l'adulte. La biologie du développement pourrait donc nous donner des clés pour comprendre ce qu'est le vieillissement chez l'animal adulte et ce que sont de nombreuses maladies neurodégénératives comme la maladie d'Alzheimer.



En conclusion, revenons sur ce que ces résultats rapportés de façon extrêmement schématiques nous disent sur ce qu'on appelle "pensée". Il existe beaucoup de confusions sur le terme de "pensée". La pensée n'est pas une substance, elle n'est pas un mécanisme. Pour un biologiste, la pensée est le rapport adaptatif que tout corps vivant entretient avec son milieu. Les arthropodes, les invertébrés, ont une pensée qui est très génétique : leur rapport au milieu est fixé, très proche de leur génome. C'est une contrainte mais c'est peut-être aussi un succès parce qu'ils se développent de façon clonale. Des mutations favorables peuvent être reproduites très vite. La connaissance que nous avons des arthropodes, dans un certain sens soutiennent les thèses sociobiologiques. Si on veut bien admettre que la pensée est le rapport adaptatif à son milieu, alors, tous les êtres, animaux et plantes, pensent. Chez les vertébrés et au plus haut point chez Homo sapiens, le milieu modifie la structure. Nos gènes font que nous sommes Homo sapiens mais ils nous donnent une très grande liberté par rapport au milieu. L'évolution a sélectionné une stratégie de développement qui fait que

chaque individu peut se modifier au cours de sa vie, qu'il bénéficie d'une très grande liberté épigénétique. C'est une des bases du succès et de l'adaptation de l'espèce humaine, encore que, sans vouloir être pessimiste, après 200 000 ans d'existence à peine, nous ne savons pas vers quoi mènera ce perfectionnement extraordinaire des mécanismes épigénétiques. Enfin, nous pouvons nous adapter par individuation mais aussi par l'invention d'artefacts comme la culture qui est, avec la mémoire génétique et la mémoire individuelle, la troisième et dernière forme de mémoire à laquelle nous pouvons nous référer pour penser le vivant.

 

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Découverte d'une potentielle cible thérapeutique pour lutter contre les trypanosomes

 


 

 

 

 

 

Paris, 26 octobre 2017
Découverte d'une potentielle cible thérapeutique pour lutter contre les trypanosomes


L'équipe de Yaser Hashem du laboratoire Architecture et réactivité de l'ARN du CNRS vient de découvrir une nouvelle cible potentiellement thérapeutique – située dans les ribosomes – pour lutter contre les parasites de la famille des trypanosomes. Grâce à la technique de cryomicroscopie électronique1, ces chercheurs, basés à l'Institut de biologie moléculaire et cellulaire (CNRS / Université de Strasbourg), ont analysé en détail la structure de ces parasites et révélé l'un de leurs points faibles potentiels, passé inaperçu jusqu'à maintenant. Cette découverte ouvre la voie au développement de nouvelles thérapies plus sûres, moins toxiques et plus spécifiques pour combattre les trypanosomes, responsables de la maladie de Chagas ou encore de la maladie du sommeil. Cette étude est publiée le 26 octobre 2017 dans la revue Structure.

Les trypanosomes, appelés plus généralement kinetoplastides, sont des parasites unicellulaires responsables d'une variété de maladies plus ou moins graves, mais qui peuvent parfois être létales. Trypanosoma brucei, Trypanosoma cruzi et Leishmania major sont probablement les plus connus et causent respectivement la maladie du sommeil, la maladie de Chagas et des Leishmanioses.

A la différence des bactéries, ces organismes sont des eucaryotes, c'est-à-dire que leurs cellules contiennent un noyau, tout comme les cellules humaines. Les similarités, même faibles, entre les cellules animales et celles des trypanosomes, rendent difficile certaines approches thérapeutiques. En effet, des antibiotiques ciblant des machineries moléculaires données, comme les ribosomes, pourraient endommager, par la même occasion, nos propres cellules. Jusqu'à aujourd'hui, les chercheurs pensaient que les ribosomes d'eucaryotes (impliqués dans la synthèse des protéines) avaient une structure extrêmement similaire d'une espèce d'eucaryotes à une autre comme par exemple entre humains et trypanosomes, les rendant ainsi inattaquables. Les progrès technologiques ont pourtant permis de visualiser les ribosomes des trypanosomes à une résolution quasi atomique et d'en faire ressortir une différence qui pourrait bien devenir une cible thérapeutique.

L'équipe de Yaser Hashem s'est notamment intéressée à l'architecture du ribosome de Trypanosoma cruzi. En utilisant la technique de cryomicroscopie électronique – qui permet de visualiser une structure biologique dans son état natif par cryogénisation de l'échantillon – associée à de la spectrométrie de masse – qui permet de déterminer une composition protéique précise en se basant sur la masse de chaque élément – une protéine spécifique des ribosomes des trypanosomes a pu être mise en évidence : KSRP (kinetoplastid-specific ribosomal protein). En plus d'être spécifique de ces parasites, KSPR est essentielle à leur survie puisque l'inhibition de son activité conduit à la mort des parasites. Cependant le rôle exact de KSRP dans la synthèse de protéines reste à élucider.

La découverte de KSRP laisse entrevoir de futurs progrès dans la recherche médicale pour développer de nouvelles thérapies contre les parasites de la famille des trypanosomes. L'élucidation de la structure de cette nouvelle protéine pourrait permettre de concevoir des molécules capables d'interagir avec elle et l'inhiber de manière hautement spécifique, sans interférer avec les cellules de l'hôte. La possibilité de cibler et inhiber KSRP dans les parasites représente ainsi une alternative plus sûre et surtout plus spécifique comparée aux traitements actuels extrêmement lourds et toxiques.


Ribosome du parasite Trypanosoma cruzi. Illustration montrant le ribosome cytosolique des trypanosomes, celui-ci est extrait du parasite T. cruzi. L'analyse de la structure par cryo-microscopie électronique (au milieu) du ribosome montre l'existence d'une nouvelle protéine, spécifique à cette famille d'organismes. Cette protéine a été nommée KSRP, pour « Kinetoplastid-specific ribosomal protein ». Malgré sa constance, cette protéine est passée inaperçue des années durant, même après la publication de la première structure de ce ribosome à haute résolution.



Télécharger le communiqué de presse :


Notes :
1 Le prix Nobel de chimie 2017 vient d'être décerné à Jacques Dubochet, Joachim Frank et Richard Henderson, pour le développement de cette technique. Joachim Frank est le mentor scientifique et un proche collaborateur de Yaser Hashem (ils sont co-auteurs de 13 publications dans des revues scientifiques de haut rang) : la découverte de cette potentielle cible thérapeutique est un projet qui a démarré à la Columbia University (New York) lorsque Yaser Hashem était dans l'équipe de Joachim Frank.
Références :
The cryo-EM structure of a novel 40S kinetoplastid-specific ribosomal protein. Jailson Brito Querido, Eder Mancera-Martínez, Quentin Vicens, Anthony Bochler, Johana Chicher, Angelita Simonetti, and Yaser Hashem. Le 26 octobre 2017, Structure. Consulter le site web


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THÉRAPIE GÉNIQUE

 

 

 

 

 

 

 

Thérapie génique


Dossier réalisé en collaboration avec Anne Galy, directeur de recherche à l’Inserm (unité 951 Inserm / université d'Evry Val d'Essonne / Ecole pratique des hautes études, "Immunologie moléculaire et biothérapies innovantes", Généthon, Evry) - Mars 2014.
La thérapie génique utilise des acides nucléiques (ADN ou ARN) pour soigner ou prévenir des maladies. Selon la pathologie, cet objectif peut être atteint en délivrant aux cellules un gène fonctionnel qui remplace le gène défectueux à l’origine de la maladie (transgène), un gène à action thérapeutique, ou encore de l’ARN capable de réguler ou bloquer partiellement l’expression d’un gène altéré. Ces acides nucléiques sont le plus souvent transportés dans les cellules du patient grâce à un vecteur viral, mais ils peuvent également être injectés directement dans les cellules, sous forme d’ADN nu.

Cellule hématopoïétique corrigée par tranfert de gène.
Le concept de thérapie génique date des années 1950 mais il s’est réellement concrétisé dans les années 90, avec les premiers essais conduits chez l’homme. En 1995, le premier patient traité de façon stable grâce à l’injection de cellules souches et de lymphocytes génétiquement modifiés (par une équipe milanaise) était atteint d’immunodéficience sévère de type ADA DICS. Un premier pas, transformé dans les années 2000 par un succès thérapeutique éclatant, obtenu à l’hôpital Necker chez les patients atteints d’une autre forme de déficit immunitaire (DICS de type X1) (voir plus loin). A l’époque, la thérapie génique était souvent présentée comme un moyen de lutter contre des maladies monogéniques (liée à la dysfonction d’un seul gène), en délivrant un gène "sain" capable de suppléer le gène "malade". En réalité, les indications sont beaucoup plus larges : plus de 1 800 essais cliniques de thérapie génique sont en cours à ce jour, dont 65 % en cancérologie, 10 % dans le domaine cardiovasculaire et 10 % seulement dans celui des maladies monogéniques (en particulier des immunodéficiences et des maladies hématologiques, mais également des pathologies comme la mucoviscidose). D’autres essais concernent des maladies infectieuses (tétanos, sida…), neurologiques (sclérose latérale amyotrophique, la sclérose en plaques ou encore les maladies d’Alzheimer et de Parkinson), ophtalmologiques (rétinite pigmentaire, glaucome, dégénérescence maculaire liée à l’âge) ou encore dans des maladies inflammatoires comme l’arthrose ou la polyarthrite rhumatoïde.

Environ trois quarts de ces essais sont des études de phase I ou II, qui évaluent la sécurité et l’efficacité des traitements testés. Les essais de phase III (qui permettent de statuer sur le rapport bénéfice/risque d’un nouveau traitement par rapport à un traitement de référence ou à un placebo) ne représentent que 4,5 % des études cliniques en cours. Néanmoins, ce chiffre ne cesse de progresser, avec de belles promesses par exemple dans le traitement de maladies monogéniques telles que l’amaurose congénitale de Leber, l’hémophilie B, la bêta-thalassémie ou dans le traitement du cancer, par transfert de lymphocytes T génétiquement modifiés.

Deux médicaments de thérapie génique sur le marché
Deux médicaments ont déjà surmonté tous les obstacles du développement clinique et sont déjà sur le marché. L’un d’eux, Gencidine est commercialisé en Chine depuis 2004. Il est indiqué dans le traitement de carcinomes de la tête et du cou. Il s’agit d’un gène suppresseur de tumeur (p53), véhiculé par un adénovirus. Plus de 10 000 patients ont été traités par ce médicament à ce jour, sans effet indésirable notable. En Europe, le premier médicament de thérapie génique a été approuvé fin 2012. Il s’agit du Glybera, injectable par voie intramusculaire, indiqué en cas de déficit familial en lipoprotéine lipase.
L’arrivée de ce médicament sur le marché européen a marqué un tournant décisif dans ce domaine médical : la thérapie génique n’est plus seulement une stratégie expérimentale étudiée en laboratoire. Elle peut aboutir à la mise au point de médicaments commercialisables, à condition de surmonter les contraintes règlementaires et industrielles (production de vecteurs et de transgènes dans des conditions standardisées et contrôlées, évaluation précise du rapport bénéfice-risque). Ce développement ne peut se faire sans le concours d’experts médicaux et industriels.

Les techniques diffèrent en fonction des indications

Les deux principales stratégies de thérapie génique : La thérapie génique consiste à modifier génétiquement des cellules d’un patient, pour soigner ou prévenir une maladie. Les protocoles utilisés varient en fonctions des indications et des objectifs thérapeutiques. Les cellules peuvent être modifiées in vivo, directement dans l’organisme du patient, ou ex vivo. Dans le second cas, des cellules souches sont prélevées chez le patient, modifiées en laboratoire, puis réinjectées.
Les protocoles de thérapie génique varient en fonction des indications et des objectifs thérapeutiques à atteindre. Cependant, ils consistent toujours à modifier génétiquement les cellules du patients, ex vivo ou in vivo, de façon pérenne ou transitoire.
Ainsi, dans le cas d’une maladie monogénique qui affecte les cellules sanguines, des cellules souches hématopoïétiques (cellules à l’origine de l’ensemble des cellules sanguines) sont prélevées chez le patient lors d’une procédure qui s’apparente à une simple prise de sang. Ces cellules sont ensuite modifiées ex vivo : un vecteur (voir plus loin) est utilisé pour leur délivrer un transgène thérapeutique, puis elles sont placées en culture pendant quelques jours. Lorsque les cellules ainsi traitées commencent à exprimer le gène thérapeutique, elles sont finalement réinjectées au patient par perfusion veineuse. Les cellules modifiées vont alors proliférer dans l’organisme du patient et, à priori, contribuer à le soigner. L’avantage de cette approche est de modifier une population de cellules bien précise, sans risque de voir le vecteur pénétrer dans des organes non ciblés.
Cependant, il n’est pas toujours possible de prélever les cellules à corriger : cette stratégie ne peut être utilisée lorsqu’il s’agit de modifier des cellules cardiaques ou encore des neurones. Des protocoles prévoient alors l’injection du vecteur contenant le transgène directement dans les organes cibles, in vivo. Par exemple, dans le cas de l’amaurose de Leber, une dégénérescence rétinienne responsable de cécité, l’injection du vecteur contenant le transgène se fait directement dans la rétine. Avec cette stratégie, le risque est une dissémination du transgène moins maîtrisée.
Dans 2 % des essais de thérapie génique, la technique utilisée s’apparente à une chirurgie du gène : on parle de "saut d’exon". Cette approche consiste à amener la cellule à produire une version de la protéine déficiente chez le patient plus courte que la protéine normale mais fonctionnelle, en "sautant" la partie du gène qui porte la mutation à l’origine de la maladie. Le saut d’exon a été testé pour traiter la dystrophie de Duchenne chez l’animal (équipe d’Olivier Danos et Luis Garcia, Généthon, Evry), puis chez l’homme. Plusieurs essais cliniques sont en cours, notamment à l’Institut de Myologie à Paris. Cette technique s’applique particulièrement bien à cette maladie car le gène impliqué est trop grand pour être transporté par un vecteur de transfert de gène. Des applications potentielles sont envisagées dans d’autres pathologies génétiques.

Schéma de la technique du saut d'exon
Une autre approche, consistant à réparer le gène altéré directement au cœur de la cellule, est séduisante par sa précision. Elle éviterait certains effets indésirables associés au transfert d’un transgène. En pratique, cette stratégie s’appuie sur l’utilisation d’enzymes appelées "nucléases", capables de repérer des séquences particulières de l’ADN de part et d’autre de la mutation à réparer et de couper le chromosome à cet endroit précis. La machinerie cellulaire se met alors en marche pour réparer son ADN. Si une copie "saine" du gène à restaurer est alors délivrée dans la cellule, elle va servir de matrice de réparation, permettant ainsi la reconstitution d’un gène complet et fonctionnel. Cette technique fonctionne efficacement in vitro et les premiers essais conduits in vivo sont en cours. Une société française, Cellectis, est pionnière dans le domaine.
 
Le choix de l’acide nucléique thérapeutique dépend de l’indication
Dans le cadre du traitement du cancer, une piste privilégiée consiste à stimuler le système immunitaire du patient contre sa propre tumeur, de manière à faciliter la reconnaissance des cellules cancéreuses et leur élimination. Pour y parvenir, des essais ont par exemple consisté à prélever des lymphocytes T ou des cellules présentatrices d’antigènes de type dendritique chez les patients, à y introduire un gène codant pour une protéine impliquée dans la reconnaissance des cellules tumorales ou dans leur destruction (antigènes tumoraux, cytokines, gènes suppresseurs de tumeur ou encore enzymes suicides) et à réinjecter le tout dans l’organisme des patients. Les résultats sont globalement mitigés. Des améliorations restent à réaliser pour rendre les vecteurs utilisés plus immunogènes ou mieux contrôlables.
Dans le domaine cardiovasculaire, les chercheurs tentent d’utiliser la thérapie génique pour favoriser la régénération des tissus vasculaires en cas d’ischémie artérielle. Pour ce faire, ils utilisent des gènes codants pour des facteurs de croissance vasculaires. Ils essaient également de diminuer la resténose (prolifération cellulaire non souhaitée après la pose d’un stent) en injectant des produits inhibant la croissance cellulaire des parois artérielles.

Thérapie génique de l'adrénoleucodystrophie
Dans le cadre de la prise en charge des maladies monogéniques, de nombreux essais concernent les déficits immunitaires comme l’immunodéficience sévère combinée (SCID), l’immunodéficience par déficit en adénosine désaminase (ADA-SCID), le syndrome de Wiskott Aldrich ou la granulomatose septique chronique, mais également des maladies hématologiques comme l’hémophilie B ou A, l’anémie de Fanconi ou encore la bêta-thalassémie. D’autres travaux concernent les pathologies rétiniennes comme l’amaurose de Leber ou la neuropathie optique de Leber, les maladies lysosomales comme la maladie de Sanfilipo ou la maladie de Gaucher et d’autres maladies neuro-dégénératives comme l’adrénoleucodystrophie ou la leucodystrophie métachromatique. Dernier exemple, les maladies de la peau telles que l’épidermolyse bulleuse. Toutes ces pathologies sont liées au défaut de fonctionnement d’un gène unique.
Dans le cas des maladies hématologiques, plusieurs essais consistant à modifier des cellules souches ex vivo en y injectant une copie saine du gène à l’origine de la maladie, puis à les réinjecter dans le sang du patient ont montré un bénéfice durable pour les patients. Dans le futur, l’utilisation de divers types de cellules souches telles que les cellules souches pluripotentes induites, ou encore de nouvelles modalités d’ingénierie tissulaire, pourront faire partie de l’arsenal thérapeutique associé à la thérapie génique.
Dans le domaine des maladies infectieuses, un traitement curatif par thérapie génique pourrait être envisagé par exemple en cas d’infection par le VIH. Plusieurs approches sont étudiées. La première consiste à modifier les lymphocytes T4 CD4 des patients (cibles du VIH) afin de les rendre résistants au virus. A cette fin, un clinicien prélèverait des cellules souches hématopoïétiques dans le sang du patient et y ferait rentrer un gène qui rendrait ces cellules insensibles au virus (plusieurs gènes pourraient être utilisés comme le démontre des essais réalisés in vitro). Les cellules modifiées seraient ensuite réinjectées dans l’organisme du patient et conduiraient à la production de lymphocytes T4 CD4 résistants au VIH, capables de survivre et de se multiplier. Des essais conduits chez l’animal et, récemment, un essai clinique mené chez l’homme ont été publiés : les résultats sont encourageants. Dans le cadre d’une seconde approche, les chercheurs travaillent au développement de vaccins à partir de vecteurs viraux utilisés pour le transfert de gène. Des résultats encourageants en terme de protection ont été obtenus chez les primates et des essais se préparent chez l’homme.
Les vecteurs, une clé du succès de la thérapie
Pour faire pénétrer l’acide nucléique à visée thérapeutique dans les cellules du patient, on utilise un vecteur chargé d’assurer ce transport. Des virus modifiés (vecteurs viraux) sont utilisés dans plus de deux tiers des essais. Ce type de vecteurs reste la référence à ce jour.
Il existe des vecteurs viraux non réplicatifs (qui ne peuvent se multiplier), intégratifs (l’ADN du vecteur viral s’intègre dans l’ADN de l’hôte), non intégratifs (le transgène demeure dans la cellule sans s’intégrer au génome de l’hôte) et des vecteurs non viraux non intégratifs. Dans tous les cas, les vecteurs utilisés font l’objet d’une ingénierie importante pour annuler leur potentiel toxique et, lorsque cela est nécessaire, pour les rendre les plus silencieux possibles vis-à-vis du système immunitaire de l’hôte afin de permettre une correction thérapeutique à long terme.

Institut du thorax UMR 915
Les débuts de la thérapie génique ont été marqués par des accidents liés à l’utilisation de vecteurs viraux qui ont pénétré dans des organes non cibles, ou qui ont provoqué l’intégration du transgène dans des séquences dites "pro-oncogènes" du génome du patient, déclenchant des cancers voire des décès. Ces accidents ont incité les chercheurs à explorer le fonctionnement précis de ces vecteurs viraux, la façon dont ils intègrent leur ADN dans les chromosomes de l’hôte... Ces connaissances ont beaucoup contribué au développement de la thérapie génique, grâce à la mise au point de vecteurs plus sûrs et plus efficaces. L’avènement des techniques "à haut débit" pour le séquençage des génomes et l’analyse des séquences obtenues a constitué une avancée indispensable dans ce secteur.
Les vecteurs viraux intégratifs insèrent leur ADN (qui contient le transgène thérapeutique) dans le génome de l’hôte. En conséquence, le gène thérapeutique est transmis aux cellules filles en cas de divisions cellulaires. Ces vecteurs sont idéaux en cas de thérapie cellulaire et de thérapie génique utilisant des cellules souches, ainsi que dans les approches où l’effet recherché doit être permanent.
Parmi les vecteurs viraux intégratifs, les rétrovirus ont été beaucoup utilisés dans les années 2000, mais le recours à cette famille de vecteurs viraux déclinent peu à peu : aujourd’hui moins de 20 % des essais en cours les utilisent. Ils ont en effet été impliqués dans la survenue de leucémies lors des essais menés sur les "enfants bulles" dans les années 2000. Ces virus sont désormais mieux connus et maitrisés, de sorte à réduire le risque d’insertion aléatoire dans le génome de l’hôte. Une fonction d’ "auto-inactivation" empêche notamment le virus de déclencher l’expression inopportune d’un gène proche du site où il s’est inséré.
Mais pour palier ce risque d’insertion aléatoire, les chercheurs utilisent de plus en plus souvent des lentivirus. Ceux-ci semblent en effet avoir un profil d’intégration génomique plus sûr que celui des rétrovirus. Par ailleurs, les lentivirus pénètrent bien dans des cellules qui ne se divisent pas comme les neurones ou les cellules hépatiques (alors que les rétrovirus s’y insèrent mal). Ces virus sont dérivés de virus humains comme le VIH, mais ils sont modifiés de manière à être inoffensifs. Des essais ont été menés grâce à ces vecteurs dans le traitement de l'adrénoleucodystrophie (par l’équipe de Nathalie Cartier et Patrick Aubourg, unité Inserm 986, Kremlin-Bicêtre) ou encore dans le traitement d'hémoglobinopathies (par l’équipe de Philippe Leboulch et Yves Beuzard, à Paris), en collaboration avec le Centre d’investigation clinique intégré en biothérapie de l’hôpital Necker (Paris). Par ailleurs, compte tenu du potentiel de ces vecteurs et grâce au travail de l’équipe d’Anne Galy (unité Inserm 951, Evry), le Généthon a mis en place une production industrielle de vecteurs lentiviraux et collabore avec de nombreuses équipes internationales qui les utilisent, notamment pour le traitement du syndrome de Wiskott-Aldrich.
Quand il s’agit de faire pénétrer un transgène dans des cellules qui ne se divisent pas, les vecteurs non intégratifs sont privilégiés car ils sont considérés comme plus sûrs. Avec ces vecteurs, le transgène reste dans la cellule de l’hôte, mais sans s’insérer dans son génome. Il s’exprime pendant la durée de vie de la cellule et disparaît avec la mort de celle-ci. Les adénovirus ont été très utilisés dans le passé mais leur usage tend à diminuer, notamment pour le traitement des maladies monogéniques. Ils restent cependant des vecteurs de choix en immunothérapie contre le cancer. Ils peuvent transporter de plus grandes séquences d’ADN que les virus intégratifs, même si la taille maximale des transgènes transportés reste parfois inférieure à celle de gènes humains. Ce type de vecteurs présente plusieurs avantages : il pénètre bien dans les cellules qui ne sont pas en division et il est associé à un niveau élevé d’expression du gène vectorisé.

Les vecteurs dérivés de virus adéno-associés (ou AAV) permettent le transfert de petites séquences génétiques (seulement 4 kilobases contre 13 kilobases avec les lentivirus). Ils sont intéressants car peu inflammatoires. Ils sont de plus en plus utilisés, par exemple pour le traitement de l’amaurose de Leber. Le seul médicament de thérapie génique autorisé en Europe (Glybera) utilise d’ailleurs ce type de vecteur.
En parallèle, la mise au point de vecteurs non viraux se poursuit afin de répondre à deux problématiques : une meilleure sécurité des vecteurs et le transport de grandes quantités d’ADN. A ce titre, près de 20 % des essais de thérapie génique se fondent sur l’injection directe d’ADN nu modifié et protégé des enzymes cellulaires (nucléases) grâce à des modifications chimiques. Une autre stratégie est la lipofection : le gène thérapeutique est associé à des lipides cationiques qui favorisent son entrée dans la cellule hôte.
Des succès majeurs à retenir
La France est un des leaders mondiaux de la thérapie génique, tant au niveau académique qu’au niveau clinique, en particulier grâce à des équipes attachées à l’Inserm.
En 1999, des équipes françaises (Salima Hacein-Bey Abina, Marina Cavazzana et Alain Fischer, unité Inserm 768, hôpital Necker, Paris), en collaboration avec des équipes anglaises, ont été pionnières dans le traitement par thérapie génique des "bébés bulles" (atteints de SCID X1). Malgré la survenue de plusieurs cas de leucémies chez les 19 patients inclus, les effets thérapeutiques du traitement persistent encore. Sur les 9 enfants traités en France il y a plus de 10 ans, 8 sont vivants, à domicile, et suivent une scolarité normale. Sans ce traitement, leur espérance de vie était très limitée.

Alain Fischer, Unité Inserm 768, "Développement normal et pathologique du système immunitaire", Département de Biothérapies et Unité d’Immunologie et d’Hématologie pédiatrique, Hôpital Necker Enfants Malades AP-HP, Université Paris Descartes, Paris
L’amaurose de Leber a également fait l’objet d’essais aux résultats remarquables. La maladie correspond à une dégénérescence pigmentaire au niveau de la rétine pouvant conduire à la cécité. Elle est causée par une mutation affectant le gène RPE65. L’injection d’un vecteur de type AAV contenant une copie fonctionnelle de ce gène, directement dans la rétine, a permis de stopper l’évolution de la maladie et de préserver la vision qui restait aux patients. Les premiers essais réussis ont eu lieu en Angleterre et aux Etats-Unis en 2007. Un essai est actuellement en cours à Nantes (équipe de Fabienne Rolling et Philippe Moullier, unité Inserm 1089, Nantes). Une société américaine vient d’être créée pour développer cette stratégie (Spark Therapeutics) et une autre existe en France, GenSight, fondée par José-Alain Sahel, directeur de l’Institut de la Vision (unité Inserm 968), à Paris.
L’adrénoleucodystrophie, une maladie génétique neurodégénérative liée à une démyélinisation du système nerveux central, a également fait l’objet de travaux prometteurs. Un essai a été mené chez quatre enfants en 2009, par des équipes françaises (Nathalie Cartier et Patrick Aubourg, unité Inserm 986, Kremelin-Bicêtre), en collaboration avec une société biotechnologique américaine et avec l’hôpital Necker (Paris). La stratégie utilisée consiste à prélever des cellules souches de la moelle osseuse (cellules souches mésenchymateuses), à les corriger génétiquement ex vivo à l’aide d’un lentivirus, puis à les réinjecter dans la circulation sanguine. Le traitement a permis de stopper l’évolution de la maladie chez ces enfants qui mènent aujourd’hui une vie pratiquement normale. Cet essai a ouvert la voie au développement de cette stratégie pour de nombreuses autres maladies neurodégénératives. Un résultat tout à fait spectaculaire vient notamment d’être obtenu par une équipe italienne (Alessandra Biffi et Luigi Naldini, à Milan) chez des enfants atteints de leucodystrophie métachromatique, une autre maladie génétique neurodégénérative. D’autres approches sont également en cours de développement dans le traitement de maladies lysosomales comme la maladie de Sanfilippo, avec par exemple les travaux menés par Jean-Michel Heard à l’Institut Pasteur (unité 1115 Institut Pasteur/Inserm), Marc Tardieu à l’hôpital Bicêtre et Michel Zerah à l’hôpital Necker, à Paris.
 

Un essai lancé en 2010 a en outre montré l’efficacité de la thérapie génique pour le traitement de l’hémophilie B. Il s’agit cette fois d’un protocole anglo-américain (équipe d’Amit Nathwani, à Londres). Les chercheurs ont utilisé un vecteur AAV contenant un gène FIX, capable de restaurer la coagulation sanguine. Six patients ont été inclus. Le gène s’est exprimé chez tous les participants et a permis aux quatre d’entre eux (qui avaient reçu les doses de vecteur les plus fortes) d’interrompre leur traitement prophylactique contre les hémorragies spontanées. Le suivi à long terme devra confirmer la sécurité du traitement et la persistance de l’effet thérapeutique dans le temps.
Les personnes atteintes de bêta-thalassémie, une forme majeure d’anémie, pourraient également être, à l’avenir, traitées par thérapie génique à en croire les résultats d’un essai français mené en 2010 (équipe de Philippe Leboulch et Marina Cavazzana à Paris). Il s’agissait d’un essai pionner qui a permis de soigner un patient âgé de 18 ans. Une première mondiale. Ce patient a été transplanté avec ses propres cellules hématopoïétiques CD34 corrigées ex vivo grâce à un lentivirus pour qu’elles expriment un transgène bêta-globine. Le jeune homme a retrouvé une vie normale, sans recours à des transfusions sanguines mensuelles.
Dans le domaine du cancer, les résultats sont plus aléatoires mais certains travaux sont encourageants. Une équipe américaine a par exemple prouvé, en 2010, l’efficacité de cellules T modifiées pour le traitement de leucémies (équipe de Carl June et Bruce Levine, à Philadelphie). Les chercheurs ont utilisé un vecteur lentiviral de type HIV-1 car il s’intègre naturellement dans les lymphocytes T. Ce vecteur a permis le transfert de gènes codant pour des protéines qui facilitent la reconnaissance des cellules tumorales à les éliminer. La société Novartis a investi dans le secteur et plusieurs start-up se sont créées, telles que Juno Therapeutics à Seattle.
Le secteur industriel, autour de la thérapie génique et les filières de service associées, se développe dans le monde et en France. Plusieurs personnalités de la recherche française rattachées à l’Inserm ont été pionnières dans ces démarches : Citons par exemple David Klatzmann avec la création de Genopoietic en 1993, mais également Pierre Charneau avec Theravectys, David Sourdive avec Cellectis, Philippe Leboulch avec Bluebird bio ou encore récemment José-Alain Sahel avec la fondation de GenSight Biologics en 2012. L’AFM Téléthon a par ailleurs investi depuis de nombreuses années dans la thérapie génique. Et Généthon BioProd, le premier établissement pharmaceutique à but non-lucratif dédié à la fabrication de médicaments de thérapie cellulaire et génique, a récemment ouvert à Evry.

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GENETIQUE

 

 

 

 

 

 

 

Chirurgie du gène : Des chercheurs démontrent la faisabilité du saut d’exon pour des malades atteints de dysferlinopathies
03 décembre 2009


L’équipe de Nicolas Lévy de l’Université de la Méditerranée (Inserm UMR S 910 ‘‘Génétique Médicale et Génomique Fonctionnelle”, Faculté de Médecine de Marseille), en collaboration avec les équipes de Luis Garcia et Vincent Mouly/Gillian Butler-Browne à l’Institut de Myologie (UPMC/Paris 6/Inserm UMR S 974, CNRS UMR 7215, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière), vient de démontrer la pertinence et la faisabilité du saut d’exon dans certains cas de dysferlinopathies, un groupe de dystrophies musculaires. Le saut d’exon, un traitement déjà à l’étude chez l’Homme pour la myopathie de Duchenne, pourrait donc être une voie thérapeutique pour d’autres maladies neuromusculaires. Des travaux publiés online le 1er décembre 2009 dans Human Mutation et financés notamment grâce aux dons du Téléthon.
Les dysferlinopathies représentent un groupe hétérogène de dystrophies musculaires récessives ayant en commun des anomalies dans le gène de la dysferline, une protéine impliquée notamment dans la réparation de la membrane des fibres musculaires. Les plus fréquentes de ces maladies sont la dystrophie musculaire des ceintures 2B (LGMD2B) et la myopathie distale de Miyoshi. La première se traduit par une atteinte des muscles des épaules (ceinture scapulaire) et du bassin (ceinture pelvienne) tandis que la seconde touche principalement les extrémités des membres (jambes, pieds, avant-bras, mains).

Coupe transversale de fibres musculaires. Coloration DPNH.
A ce jour, plus de 350 anomalies différentes du gène ont été identifiées, des mutations qui se manifestent par des symptômes plus ou moins sévères selon les malades. Or, en 2006, en étudiant une famille concernée par une dysferlinopathie, l’équipe de Michael Sinnreich de l’Institut neurologique de Montréal a constaté que la mère de deux filles sévèrement atteintes était elle-même très tardivement et peu atteinte. En y regardant de plus près, les chercheurs ont découvert que cette mère portait la même mutation que ses filles sur un des deux chromosomes, mais que, sur l’autre chromosome, l’exon 32 était naturellement absent.
A partir de ces résultats, l’équipe de Nicolas Lévy de l’Inserm et de l’Université de la Méditerranée (Marseille), en collaboration avec les équipes de l’Institut de Myologie (Paris), a imaginé reproduire ce saut d’exon naturel en laboratoire sur des cellules de patient présentant des mutations de l’exon 32. L’objectif était donc de reproduire sur ces cellules porteuses d’une mutation dans l’exon 32, une situation similaire à celle observée pour la patiente décrite par l’équipe de Michael Sinnreich, associée à une atteinte très modérée. Pour cela, ils se sont appuyés, grâce à la collaboration avec les équipes de Luis Garcia et Vincent Mouly/Gillian Butler-Browne, sur les différentes techniques qui sont aujourd’hui à l’étude pour la dystrophine, la protéine dont la déficience est à l’origine des myopathies de Duchenne et de Becker, mais également pour d’autres maladies neuromusculaires. Dans un premier temps, trois oligonucléotides antisens synthétiques* ont été testés permettant d’identifier deux zones du génome à cibler pour favoriser le saut de l’exon 32. Les chercheurs ont alors ciblé ces deux zones à l’aide d’un gène U7 produisant un ARN antisens, lequel a été apporté aux cellules malades grâce à un lentivirus. Au terme de ces travaux, que ce soit avec les oligonucléotides antisens seuls ou apportés par un lentivirus, les chercheurs ont pu observer, dans les cellules traitées, un ARN tronqué dans lequel l’exon 32 a été supprimé. Ceci a donc permis de supprimer dans les cellules de patient la mutation préalablement présente dans l’exon 32. En d’autres termes, ils ont montré la faisabilité et la pertinence du saut de l’exon 32.

Ces travaux ouvrent la voie à un essai thérapeutique par saut d’exon pour les malades présentant des anomalies situées dans l’exon 32. D’ores et déjà, les chercheurs disposent d’une base de données UMD-DYSF, développée en collaboration avec l’équipe Christophe Béroud (IURC Montpellier) qui comporte la totalité des mutations rapportées à ce jour dans la littérature dont plus de la moitié provient de malades suivis à Marseille et Paris. Grâce à cette base et à la base néerlandaise Leiden Muscular Dystrophy pages ©, les médecins marseillais et parisiens ont identifié une vingtaine de malades atteints de dysferlinopathies susceptibles d’être concernés pour ce seul exon 32. Enfin, même si certaines parties du gène de la dysferline sont indispensables à son bon fonctionnement, les chercheurs estiment que d’autres exons que le 32 pourraient également être "ciblés" par une approche thérapeutique par saut d’exon.

Le saut d’exon, qu’est-ce que c’est ?
Un gène est composé d’introns et d’exons, ces derniers désignant la partie codante du gène qui renferme l’information nécessaire à la synthèse de la protéine. Le saut d’exon consiste à intervenir au moment de la transcription du gène en protéine pour éliminer les exons porteurs d’anomalies génétiques. La protéine qui en résulte alors est tronquée mais fonctionnelle.

*des petits bouts d’ADN synthétisés en laboratoire qui viennent se coller à l’ARN pré-messager pendant sa conversion en ARN messager

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Source
"Efficient Bypass of Mutations in Dysferlin Deficient Patient Cells by Antisense-Induced Exon Skipping"
Nicolas Wein,1 - Aurélie Avril,2 - Marc Bartoli,1 - Cyriaque Beley,2 - Soraya Chaouch,2 - Pascal Laforêt,3 - Anthony Behin,3 - Gillian Butler-Browne,2 - Vincent Mouly,2 - Martin Krahn,1,4 - Luis Garcia,2* and Nicolas Lévy1,4*£
1- Université de la Méditerranée, Inserm UMR S 910 ‘‘Génétique Médicale et Génomique Fonctionnelle”, Faculté de Médecine de Marseille, France;
2- Université Pierre et Marie Curie/Paris 6/Inserm UMR S 974, CNRS UMR 7215, Institut de Myologie, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris, France;
3- Centre de référence de pathologie neuromusculaire Paris Est, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Paris, France;
4- Département de Génétique Médicale, Hôpital d’enfants de la Timone, AP-HM, Marseille, France.
Human Mutation, Volume 30, Issue 12 (December 2009)
Contacts Presse
AFM
Stéphanie Bardon/Marie Rocher
Tél. : 01 69 47 28 28

 

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